
BANDE-ANNONCE DE « ZOLA L’INFRÉQUENTABLE » AU …
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La pièce Zola l’infréquentable met en scène le face à face particulièrement virulent entre deux hommes Emile ZOLA, le romancier humaniste et Léon DAUDET, journaliste, pamphlétaire nationaliste et antisémite en pleine affaire DREYFUS (1894-1906).
La violence de leur confrontation rappelle, hélas, certains débats qui ont eu lieu pendant les présidentielle sauf qu’elle se déroule dans le cabinet de travail de chacun des protagonistes.
Très instructif sur le fond et la forme du climat antisémitique qui régnait en France, le texte de Didier CARON se coule brillamment dans le style châtié et littéraire qu’arborent dans la pièce Zola et Daudet.
Les deux hommes parlent comme ils écrivent. Impossible d’oublier qu’ils sont écrivains et qu’ils manient la langue avec virtuosité. Il s’agit d’un duel oratoire où chaque phrase doit faire mouche et blesser l’adversaire.
Didier CARON cite d’ailleurs à plusieurs reprises des extraits d’articles de Zola et de Léon Daudet à ne pas confondre avec le cher ami de Zola, Alphonse.
C’est la lecture d’un article ignoble de Daudet qui décrit la destitution de Dreyfus qui déclenche la colère de Zola. Ce sera ensuite un autre article de Daudet qui applaudit l’acquittement du commandant Esterhazy – le véritable coupable à l’origine de l’affaire Dreyfus – qui précède la lecture du « J’accuse » de Zola dans l’Aurore le 13 Janvier 1898, article qui sera suivi d’une pétition d’intellectuels dreyfusards le 20 janvier 1898.
A la violence venimeuse de Daudet qui en somme traite Zola de « sale étranger » en raison de son origine italienne, Zola oppose sa foi humaniste. A la question de Daudet « Qui êtes-vous Zola finalement ? » ce dernier répond : « un moment de la conscience humaine ».
Les comédiens Pierre AZÉMA et Bruno PAVIOT jouent de façon magistrale. Ils ne s’expriment pas qu’en beaux parleurs, ils incarnent des hommes de chair qui lâchent en quelque sorte leurs tripes avec rage et passion.
Comment oublier que la haine déversée par un antisémite tel que Léon Daudet a eu pour conséquence la shoah.
Un grand moment de théâtre qui donne toute sa dimension à Zola l’infréquentable et agit comme une piqûre de rappel sur les dangers de la rhétorique lorsqu’elle s’appuie sur tous les ressorts de la haine la plus primaire.
Le 10 janvier 2023
Evelyne Trân
N. B : Article initialement publié dans LE MONDE LIBERTAIRE .FR