Henry PESSAR nous a quittés ce 19 Août 2020. J’avais écrit un article en 2013 sur son livre autobiographique « Dans la mémoire des étoiles » que je reproduis ci-dessous. Ce livre en version papier est malheureusement épuisé mais il doit être possible de se procurer une version numérique sur le site Photos en ligne Henry-Pessar.Com.
Je souhaite vraiment que ce livre soit réédité. D’une curiosité inlassable , Henry Pessar a parcouru le monde en tant que reporter photographe, journaliste et écrivain. Il déborde, je ne peux en parler au passé, d’idées, d’anecdotes toujours extraordinaires dont nous avons bénéficié notamment lors d’émissions à DEUX SOUS DE SCENE sur Radio Libertaire 89.4. Sa faconde alliée à une grande sensibilité lui ouvre beaucoup de portes, celle de John Lennon et Yoko Ono, notamment qu’il a photographiés lors de leur bedroom, Cela dit son musée imaginaire s’étend aux artistes moins connus, le mot fabuleux revient souvent dans sa langue et son enthousiasme, ses coups de coeur sont revigorants.
J’invite vivement les lecteurs à découvrir son site :
Henry PESSAR est un arbre volant qui prend racine là où il se déplace. Bien sûr la comparaison avec un arbre peut paraître saugrenue mais c’est l’impression qu’il donne car il regorge d’antennes et sait faire fructifier dans son corpus terrestre les éléments essentiels de l’eau et de la terre.
L’arbre de sa mémoire est si spongieux qu’il est capable de recueillir et de conserver toujours en mouvement tout ce qui contribue à son exaltation et sa curiosité insatiable vis-à-vis d’un monde qu’il a parcouru et qu’il parcourt toujours en quête de nouvelles rencontres souvent confondantes, inattendues, étranges, débordantes.
Dans son roman-voyage intitulé « Dans la mémoire des étoiles » Henry PESSAR tisse sa toile d’araignée de telle sorte que le lecteur puisse s’y déplacer comme sur une carte du monde presque en suspension et sans se soucier ni du décalage horaire, ni des distances, en se laissant balloter tout simplement, suspendu à l’écriture élégante et souple, légère et intimiste.
Evidemment, Henry PESSAR, en digne chasseur de papillons de rêves a choisi pour le lecteur les histoires les plus incroyables, celles qui débordent de la soupière. Mais encore faut-il être capable de soulever le couvercle. Avec Henry PESSAR pour guide, le lecteur finit par se croire visionnaire car c’est sous la nappe de l’invisible à l’œil nu que se présentent les plus saisissantes découvertes.
Oui vraiment, il faut se laisser surprendre par le guide de musée aveugle, le vieillard aux yeux d’azur, assister à sa rencontre avec José GORRAL, un « rouge » espagnol, réfugié à Gibraltar qui pleure en lisant un poème de LORCA, suivre l’enterrement d’un ami au cimetière de Tolède…
Ses personnages sont des villes : TOLEDE, SAN MIGUEL, SANTO DOMINGO, EDINBOURG, CHARTRES, COPENHAGUE …et des anonymes qu’il baptise : le lévrier philosophe, le lapon de haute époque …
Ses évocations stupéfiantes ne sont pas sans rappeler Jorge-Luis BORGES, autre voyageur de mémoire impénitent.
Pour réveiller sa vision de Kirsten, une femme aimée, Henry devient lyrique et c’est si beau que je ne résiste pas à vous livrer cet extrait :
« Redoutant de perdre ce joyau, je dois tenter de me rapprocher de toi avec prudence ; évoquant à peine les bribes de toi qui somnolent au fin fond de ma mémoire. Je crains de pulvériser ton image et te réduire en miettes impalpables… Souvenir restauré qui ne m’appartiendra plus ; qui n’existera qu’au second degré, réinventé, éloigné de cet instant aux mélancoliques délicatesses ; tel le parfum trop suave, volatile d’une rose thé. »
Voilà un livre à lire sans soif, un soir par exemple où on a laissé tomber la télévision pour s’abandonner à cet exercice audacieux de la lecture-rêve, miraculeuse… Merci Henry PESSAR !
Paris, le 11 Juillet 2013 Evelyne Trân
Mis à jour le 27 Août 2020