LA MÉNAGERIE DE VERRE de Tennessee Williams – Mise en scène Éric Cénat – Du 21 janvier au 8 février 2019 au Théâtre de l’Épée de Bois, Paris 12e –  Jeudi 28 février 2019 – La Pléïade à La Riche (37) à 20h30 –

Tournée

 Jeudi 28 février 2019 | La Pléïade à La Riche (37) à 20h30

Samedi 2 mars 2019 | Les Prairiales à Épernon (28) à 20h30

Jeudi 4 avril 2019 | Espace George Sand à Chécy (45) à 20h30

Vendredi 15 novembre 2019 | Théâtre du Puits Manu à Beaugency (45) à 20h30

Texte Tennessee Williams Les ayants droit de l’Auteur sont représentés dans les pays francophones européens par Renauld & Richardson, Paris (info@paris-mcr.com), en accord avec l’Agence Casorotto Ramsey Ldt, London. Traduction Isabelle Famchon La traductrice est représentée dans le monde entier par Renauld & Richardson. Mise en scène Éric Cénat Assistant Mathieu Barché

 Interprétation Charles Leplomb – Tom Wingfield

Laura Segré – Laura Wingfield

Claire Vidoni – Amanda Wingfield

Augustin Passard – Jim O’Connor

Scénographie et costumes Charlotte Villermet

Création lumière Vincent Mongourdin

 Univers sonore Christophe Séchet

Construction décor Jean-Paul Dewynter

Coiffure Catherine Nicolas

Graphisme Pia Lalloz

Régie générale Stéphane Liger

 

L’étouffement familial est un thème cher à Tennessee Williams qui le poursuivra toute sa vie.

 Dans la « Ménagerie de verre », le narrateur se souvient de son adolescence meurtrie par un environnement familial douloureux marqué par l’absence du père qui a fui, la personnalité étouffante de la mère et la fragilité de sa sœur boiteuse.

 La pièce écrite en 1944, largement autobiographique, rendit célèbre Tennessee Williams. Elle a pour cadre la ville de Saint Louis dans le Mississipi.

 Tom, le personnage principal se présente tout d’abord comme le récitant de la pièce, celui qui va revivre par le prisme de ses propres souvenirs, une page cruciale de sa vie avec sa sœur et sa mère.

 Tennessee Williams disait de cette pièce qu’elle était purement sentimentale. Ce qui frappe c’est le réalisme des dialogues où il est possible de percevoir à travers l’apparence parfois anodine des propos, les tensions, les fractures et les non-dits des personnages.

 La mise en scène d’Éric CENAT donne à penser d’emblée que nous nous trouvons devant une petite ruche d’abeilles avec un premier voile qui se dresse devant le salon familial. La mère voudrait manifestement jouer le rôle de la reine des abeilles mais elle n’a d’empire que sur sa fille car le fils menace sans arrêt de partir.

Une sorte de banderole en guise d’ironie suprême flotte dans l’air, ce sont les derniers mots du père sur fond de carte postale « Hello, Good bye ».

 La mère Amanda, encore bien pimpante ressasse les fastes de sa jeunesse, la sœur Laura, hypersensible, vit repliée sur elle-même, elle a peur du monde extérieur et a pour seule passion sa collection d’animaux en verre. Le fils désenchanté occupe un emploi sans intérêt et s’évade dans les salles de cinéma.

 Dans ce contexte, le moindre événement peut prendre des proportions démesurées. Ce sera la venue d’un ami de Tom accueilli comme un sauveur par la mère. Ne pourrait-il pas devenir le futur mari de sa fille. Nous apprendrons que Laura en était secrètement amoureuse. Hélas, au moment même où enfin Laura se lâche, s’abandonne à ses sentiments, l’ami gêné lui dévoile qu’il est déjà fiancé.

 C’est à brûle pourpoint que l’auteur s’attache à faire saillir tout ce qui crépite derrière le voile de situations ordinaires et peut conduire à la dépression, à la folie, celle sous-entendue qui menace aussi bien la mère que la fille qui se réfugient dans leur monde imaginaire.

 De ce point de vue, la mise en scène d’Éric CENAT, nous parait parfaitement cohérente, elle se déploie de façon mesurée, attentive à l’objectif de l’auteur préconisant que dans cette pièce « l‘action n’est qu’un souvenir et n’a pour conséquent rien de réel ».

 Tout est question d’interprétation en fin de compte. Un fait ne signifie rien en lui-même, tout dépend de sa perception. Tennessee Williams observe des âmes inquiètes dont les désirs et les rêves se trouvent en total décalage avec ce que la société peut leur offrir.

 L’auteur scrute ce mal être qui poursuit malgré lui Tom, de façon d’autant plus frappante qu’il n’élève pas la voix, il choisit le filtre de la mémoire parce qu’elle seule peut rendre compte rétrospectivement des effets ravageurs d’événements dont on ne mesure pas sur l’instant l’importance.

 S’il n’est pas possible de revenir sur sa vie passée en se disant « je jouerais ma vie autrement », il est possible de revisiter le palimpseste de certains traumatismes. Ecrivain engagé, Tennessee Williams promulgue le vœu d’élever la perception humaine en donnant la voix aux personnes fragiles, écrasées et sacrifiées par la parole dominante et la violence du monde qu’il dénonce.

 Nous avons été sensibles à l’interprétation sobre et nuancée de Laura SEGRE incarnant Laura Wingfield.  Charles LEPLOMB met l’accent sur la fragilité de Tom Wingfield. Augustin PASSARD relève le côté extérieur et flambant de l’ami commis d’office au rôle de loup dans la bergerie. Quant à Claire VIDONI, elle excelle dans ce rôle de mère pathétiquement borderline mais pleine de flamme.

 Sur cette toile qui verra déboutés inexorablement les rêves d’une sœur et d’une mère, le metteur en scène a choisi de ne privilégier aucun angle. La véritable perspective tient au regard, la perception de Tom, qui ne se met à la place d’aucun personnage mais continue à les observer du haut de sa distance tragique. Il a fui, il ne peut plus revenir, c’est un homme hanté, damné en quelque sorte.

 La mise en scène d’Eric CENAT permet d’appréhender toute la densité de cette pièce avec sobriété, avec douceur, une vraie marque de délicatesse, celle qui perce sous la plume de Tennessee Williams.  

 Paris, le 17 Février 2019

 Evelyne Trân

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