ALLERS-RETOURS D’ ÖDÖN VON HORVÁTH – Traduction HENRI CHRISTOPHE – Mise en scène ALAIN BATIS – 29 NOV. 23 DÉC. 18 – THÉÂTRE DE L’ÉPÉE DE BOIS CARTOUCHERIE PARIS XIIème – Jeudi et vendredi à 20h30 – Samedi à 16h et 20h30 – Dimanche à 16h – Durée estimée 2h – Pour tous les publics à partir de 12 ans

Avec Raphaël Almosni, Sylvia Amato, Alain
Carnat, Laurent Desponds, Théo Kerfridin,
Sophie Kircher, Marc Ségala, Marie-Céline
Tuvache

Dramaturgie Jean-Louis Besson,

Scénographie Sandrine Lamblin,

Musique Cyriaque Bellot,

Costumes Jean-Bernard Scotto,

Lumière JeanLouis Martineau,

Perruques et maquillages Judith Scotto,

Régie lumière Emilie Cerniaut,

Régie son Gaultier Patrice

La pièce nous raconte la mésaventure d’un homme qui par un concours de circonstances – il vient de faire faillite – est expulsé du pays où il a vécu toute sa vie et invité à retourner dans son pays d’origine qui refuse de l’accueillir en vertu d’une loi obligeant les ressortissants à se déclarer dans un délai de 5 ans. 

 Le pauvre homme dénommé Ferdinant HAVLICEK n’a plus pour perspective que celle de coucher sur le pont qui délimite la frontière entre les deux pays en attendant que les autorités prennent en considération la situation inhumaine dans laquelle il se trouve.

 L’homme en question peut bien crever, qui s’en offusquerait. Il fait juste partie des dommages collatéraux des décisions administratives qui se bornent à appliquer des lois arbitraires lesquelles ne dépendent que du bon vouloir du pouvoir politique du moment.

 En France, l’article 30 du code civil stipule :

 « La charge de la preuve, en matière de nationalité française, incombe à celui dont la nationalité est en cause ».

 Imaginez que vous ayez perdu cette preuve alléguant que bien d’origine étrangère, vous soyez bien français, vous risquez pour le moins de vous retrouver « sans papiers » lors d’un renouvellement de passeport ou carte d’identité.

Ni votre facies, et votre nom à consonance étrangère ou votre avis d’impôt ne plaideront votre cause. « Surtout n’égarez pas votre certificat de nationalisation » s’est entendu dire une personne née en France mais portant un patronyme étranger.

 Le cas de Ferdinand Havlicek n’est pas isolé. Le dramaturge Ödön von Horváth a l’intelligence d’en parler de façon que quiconque puisse s’identifier au personnage. Il s’agit d’un homme sans histoires, qui a eu juste des déboires financiers, ce qui peut arriver à tout le monde et qui se retrouve le bec dans l’eau parce qu’il ne s’est pas préoccupé de sa nationalité, étant totalement intégré dans son pays d’adoption.

Par l’entremise de la farce, l’auteur déboulonne la machine infernale qui s’abat sur Havlicek, faisant ressortir le côté humain, pitoyable et tragiquement comique des protagonistes, les douaniers, les témoins, tout un petit carnaval  de personnages frontaliers dont certains se moquent éperdument du sort de Havlicek.

Havlicek a beau lever les bras au ciel, il ne rencontre que des pantins, dont les tranches de vie sont assaisonnées d’une couleur cocasse, irrésistible.

Les gens dépeints ne sont ni gentils ni méchants. Leurs réactions sont tout bonnement humaines et profondément égoïstes. Havlicek se découvre jouet, balle perdue au milieu de leur manège. Comme il n’a plus rien à perdre et donc tout à gagner, il laisse tout ce petit monde s’agiter autour de lui et finit par tirer son épingle du jeu.

 Il a beau faire bon enfant, le manège avec ses personnages peinturlurés, il retourne le sang. Depuis la création de cette pièce en 1933, combien d’allers-retours, de guerres, combien de morts, de migrants, d’apatrides jetés par-dessus bord ?

La roue tourne comme on dit et nous en faisons partie. C’est le message de Ödön von Horváth, dramaturge reconnu puis honni par le régime nazi qui brûla ses livres. Se considérant lui-même comme apatride, il revendiquait juste l’étiquette d’humain, c’était trop en demander !

Nous saluons la mise en scène d’Alain BATIS, guignolesque et renversante. Elle appuie sur la gâchette du ridicule qui n’épargne personne, hormis Havlicek, interprété par l’excellent Raphael ALMOSNI. Quant aux autres comédiens, ils s’en donnent à cœur joie dans leurs rôles burlesques notamment de contrebandiers de cocaïne, de douaniers et surtout de ministres à côté de la plaque.

 Un spectacle totalement réjouissant, en guise de gifle à la bêtise humaine !

 Paris, le 18 Décembre 2018

 Evelyne Trân

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