Mise en scène Claude Bonin
Assistanat et actions artistiques connexes Bénédicte Jacquard
Interprétation Roland Depauw
Création Sonore Nicolas Perrin
Création vidéo Valéry Faidherbe
Scénographie Cynthia Lhopitallier
Création Lumière Vincent Houard
Une création de la compagnie Le Château de Fable Co-production Les Bords de Scènes, Le Théâtre par le Bas, La Strada & Cies Avec le concours du Théâtre de l’Epée de Bois – La Cartoucherie En partenariat avec l’association France-Islande
Au seuil de la mort, comme c’est étrange, certains êtres s’écoutent parler d’amour, seule cette langue leur est devenue accessible.
Cette langue est inexplicable et il vaut mieux qu’elle le soit parce qu’elle s’adresse à un interlocuteur unique, qui ne dépend plus que de soi, du sentiment confus que cette personne, elle fait à ce point partie de soi, que ce serait mourir deux fois que de l’oublier avant de plier bagage.
Confession d’un homme en fin de vie, La lettre à Helga de Bergsveinn BIRGISSON se lit comme une partition musicale qui met en émoi toutes ces petites intermittences du cœur qui surgissent au cours d’une randonnée solitaire en pleine nature ou lors d’une rêverie quand il est possible de s’abandonner sans l’appréhension d’un regard hostile ou extérieur.
La littérature permet ce genre de randonnée parce qu’elle n’occulte pas les contraintes, le chemin caillouteux de la pensée, mais lorsque le chemin a pour guide Helga, qui en quelque sorte enserre la main de l’écrivain, il faut croire que tout est possible.
Le narrateur pèse ses mots en connaissance de cause. En se confessant, il parle à la fois à lui-même et à Helga, sa complice d’une histoire d’amour fulgurante qui merveilleusement s’est inscrite dans le paysage de sa terre, à la fois fabuleuse et austère, vertigineuse.
Nous avions un pincement au cœur à l’idée de l’entrevoir poser ses pieds sur une scène de théâtre, Bjarni GISLASON, cet éleveur de moutons, contrôleur de fourrage, parce que nous avions incorporé sa voix intérieure sans mesurer précisément sa source première, terriblement physique, voire même brutale, la présence de cette terre Islandaise qui coule dans ses veines.
Il y aussi cette histoire d’amour avec cette terre, il y a au fond toute la vie d’un homme qui parle au nom de cette terre, génitrice de ses amours avec Helga.
Nous avons devant nous un être qui ne triche pas, le corps ne peut pas tricher, juste exprimer ce qui l’habite. Les mots font le voyage du corps, ils l’époustouflent, ils le travaillent, dans le seul but celui de lui donner la force de décliner sa dernière déclaration d’amour à la vie, à Helga.
C’est en tout cas ce que nous avons ressenti grâce au comédien Roland DEPAUW qui incarne magnifiquement le vieux Bjarni GISLASON.
La mise en scène de Claude BONIN fait entendre la source en veilleuse, qui peut prendre toute sorte de formes aussi bien celles de visions fantastiques que d’objets primaires, des lattes en bois, des sacs de jutes regorgeant de toisons de moutons.
C’est un récital de choses invisibles qui jouent à cache à cache avec le visible, que traduit avec beaucoup délicatesse les compositions de Nicolas PERRIN.
Ce spectacle est tout simplement beau qui cristallise juste une écharde dans le cœur, un amour impossible mais vivant !
Paris, le 1er Décembre 2018
Evelyne Trân