Daniel MESGUICH – Talleyrand
William MESGUICH – Fouché
Costumes Dominique LOUIS
La politique «spectacle» a depuis longtemps envahi le petit écran avec ses talk-shows, ses combats de coqs et même le guignol de l’info.
Dans les greniers de l’histoire se trouvent deux célébrités, FOUCHE et TALLEYRAND qui n’ont rien à envier à nos politiciens actuels.En tout cas Jean-Claude BRISVILLE se fait fort de relever leurs qualités communes, un certain art de la rhétorique, de la dissimulation et des effets de manche, à travers la retransmission fictive d’une conversation privée, le soir du 6 Juillet 1815.
Après la défaite de Waterloo et l’exil de Napoléon, personne ne sait encore qui va gouverner la France. Talleyrand ouvre le jeu, il a déjà pris son parti, celui du retour des Bourbons, et Fouché celui de l’avènement de la République.
Nous verrons que c’est évidemment par pragmatisme politique et non par conviction que Fouché, président alors du gouvernement provisoire, finira par répondre à l’invitation de Talleyrand d’aller rejoindre le Roi Louis XVIII. Il s’agit de toute façon pour l’un et l’autre de garantir leur avenir politique. Talleyrand aura d’ailleurs cette phrase lourde de sens :« Faut vous y faire, l’avenir aujourd’hui est au passé ».
Est-il vraiment possible d’imaginer que l’histoire d’un pays puisse se jouer à coups de dés dans les alcôves d’un salon avec du saumon et du foie gras au souper tandis que le peuple manifeste dans la rue.
A défaut de pouvoir mettre à nu les personnalités réputées monstrueuses de Talleyrand et Fouché, dans la soupente du langage, Jean-Claude BRISVILLE fait scintiller quelques indices évocateurs de leurs tours de chants politiques.
Talleyrand incarné par Daniel MESGUICH, assume sa nature narcissique, il est vrai qu’il est boiteux. Il ne se départit jamais d’une ironie persifleuse si utile pour désarçonner son adversaire Fouché, interprété par William MESGUICH, toujours sur la défensive et inquiet, prêt à rugir à tout moment.
Il s’agit donc bien d’une bataille de coqs où la perception esthétique, cérébrale, le beau langage, l’emportent sur les frayeurs. C’est par moments un peu trop léché, mais Jean-Claude BRISVILLE n’a pas prévu que les deux hommes s’empoignent véritablement.
Le spectacle requiert une écoute soutenue pour essayer de comprendre comment l’un va se soumettre à l’autre au gré du glissement de quelques belles saillies.
L’attrait majeur de la pièce tient à la présence de ces deux baroudeurs du théâtre, Daniel et William MESGUICH qui avancent leurs personnages, tels des pions sur le damier de la grande histoire, d’inaltérables voyous, selon Daniel !
Paris, le 7 janvier 2017
Evelyne Trân