
Autrice : Denise Bonal
Mise en scène : Justine Haye
Assistant mise en scène : Thibaut Besnard
Distribution : Pia Chavanis, Nolwen Cosmao, Winnie Dhénin, Elena Durant-Lozano, Chloé Oster
création Lumières : Thibault Petit
Création Affiche : Flora Ganther
LEGERE EN AOUT est la première pièce écrite en 1974 par Denise BONAL, comédienne, dramaturge et professeure d’art dramatique. Un an avant l’adoption de la loi Weil sur l’avortement, la pièce aborde un sujet grave, celui des grossesses non désirées. A l’époque, il y avait pour les femmes concernées soit la solution de l’avortement clandestin soit celui de l’accouchement sous X. Qu’une autre solution tombée du ciel prenne une forme lucrative, celle de la vente de l’enfant non désiré, c’est le sujet dont s’empare Denise BONAL avec audace et paradoxalement beaucoup de tact.
En dénonçant la situation d’isolement de femmes, futures filles mères, opprobres de la société, Denise BONAL anticipe le danger auquel sont exposées ces femmes, celui de devenir la proie d’organisations mercantiles, vendeuses de nouveaux nés.
Denise BONAL met donc en scène cinq jeunes femmes enfermées dans une clinique, la plupart de leur plein gré, qui ont pour contrat de poursuivre leur grossesse jusqu’ à la délivrance moyennant une prime conséquente, celle de la vente de leur enfant.
A travers les portraits des cinq femmes issues de milieux divers, les différentes positions et ressentis des mères porteuses sont exprimés.
Si les personnages de Menda, la portugaise et de Ginette « une ancienne pauvre » frisent légèrement la caricature par opposition aux caractères de Dominique et Solange plus effacés, les propos de Florence, la jeune rebelle, nous interpellent profondément parce qu’ils témoignent d’une véritable détresse que l’appât du gain ni les joyeuses chansons de Sheila ou de Michel Delpech ne réussissent à camoufler.
Denise BONAL ne porte pas de jugements sur ces femmes mais sa démonstration est éloquente. Voilà des femmes qui certes n’auront pas commis d’assassinat de leurs rejetons en avortant (parce que l’avortement est un crime selon les parents catholiques de Florence) mais seront devenues les complices d’un commerce de traite d’enfants.
Justine HAYE la metteure en scène qui interprète telle une dame patronnesse, Mademoiselle, la directrice de la clinique, réussit à immerger le public dans ce huis clos somme toute tragique, mais sans pathos.
Nous lui sommes reconnaissants ainsi qu’à toute l’équipe des comédiens de porter avec une si belle conviction, cette pièce de Denise BONAL, aux accents tchekhoviens, visionnaire et sensible, toujours actuelle.
Paris, le 6 Janvier 2017
Evelyne Trân