de François Bégaudeau / mise en scène Valérie Grail / scénographie Charlotte Villermet / lumières Jean-Luc Chanonat / avec Côme Thieulin et Raphaël Almosni
mardi 6 juin à 20h
mercredi 7 juin à 20h
jeudi 8 juin à 20h
vendredi 9 juin à 19h
samedi 10 juin à 20h
dimanche 11 juin à 16h
mardi 13 juin à 20h
mercredi 14 juin à 20h
jeudi 15 juin à 20h
vendredi 16 juin à 20h45
samedi 17 juin à 20h
dimanche 18 juin à 16h
► représentations hors les murs au Lycée d’Alembert les 31 mai et 1er juin (ouvert à tous, tarif unique)
L’homme est un papillon, au milieu de la foule, de loin c’est ainsi qu’on pourrait l’imaginer. Il fait partie d’un essaim, c’est un insecte qui a des antennes, c’est dire qu’il est à la fois récepteur et émetteur des informations qu’il reçoit de ses congénères.
Nous l’oublions souvent, l’homme fait partie du genre animal et il doit y avoir de grands points communs entre son comportement et ceux des autres animaux non civilisés, les autres animaux qui ne parlent pas , qui ne croient pas en Dieu mais qui sont pourtant doués de conscience, capables de souffrir et d’hurler à la mort.
L’homme en question n’est pas vraiment à l’aise dans sa posture d’adulte averti, de professeur du savoir face à des événements qui engendrent des émotions planétaires, visant à semer le trouble dans la fourmilière pour des raisons obscures, inconnues et néfastes.
Difficile de lutter contre un ennemi inconnu, un germe de virus susceptible d’affecter en priorité des jeunes gens non immunisés contre des prédateurs qui vont les utiliser comme armes destructrices.
François BEGAUDEAU dans sa pièce « Contagion » qui comporte 3 séquences, aux titres éloquents – contamination, radicalisation et exfiltration – met en scène un professeur d’histoire qui a été sollicité pour rendre compte du danger de radicalisation qui guette la jeunesse. Il prend conscience qu’il risque de se brûler les ailes sur un sujet si brûlant…
Est-il possible de regarder dans les yeux quelqu’un que vous soupçonnez d’être atteint d’une maladie contagieuse ? Ça s’attrape comment la haine, le désir de tuer, de sacrifier des vies innocentes pour faire valoir sa religion ? Qui sont ces jeunes qui rejoignent le camp de DAECH ? Ont-ils un dénominateur commun propre à la jeunesse celui de la vulnérabilité, l’inconscience, la crédulité ?
Le mal être de ces jeunes terroristes ne risque t-il pas de devenir contagieux, engendrant chez l’observateur, même de loin, un sentiment de malaise ?
Impossible pour le professeur d’interpréter un djihadiste mis en scène par un auteur dramatique, sans frémir.
A l ‘heure qu’il est nous n’avons pas de recul, et il est terrible de songer que les commetteurs d’attentats visent la légèreté de la jeunesse, sa joie de vivre. Que vont devenir ces jeunes, ces enfants qui n’auront pas eu droit à l’insouciance, qui vont devoir intégrer à l’idée de la vie celle de la mort toujours possible, dramatique.
Les protagonistes de la pièce, le professeur, l’adolescent, le journaliste, l’écrivain, portent sur leurs épaules une lourde épée de Damoclès qu’ils seraient tentés de rejeter le plus loin possible de leurs préoccupations comme Stéphane qui désespère de trouver « une zone où il soit possible de penser à autre chose ».
Côme THIEULIN qui interprète tour à tour l’adolescent, le journaliste et l’écrivain témoigne d’une grande maîtrise de jeu. Sa nervosité, son charisme servent parfaitement l’ambiance et les propos de cette pièce fiévreuse mais résolument ouverte, c’est à dire sans ambages, comme si ce qui importait à l’auteur, c’était le ressenti des personnages plus que la pertinence de leurs échanges.
Raphaël ALMOSNI complètement habité par son personnage est très émouvant.
La mise à scène adroite et efficace de Valérie GRAIL suit le rythme des battements de cœur des personnages qui savent que leur porte ouverte sur le monde va faire entrer dans leur domicile, voire même leur intimité, les témoignages entre autres des victimes des attentats. Fuir mais comment ? Même maladroitement, il faut oser laisser parler son cœur nous dit François BEGAUDEAU.
Paris, le 25 Mai 2017 Evelyne Trân