LE DEPEUPLEUR de Samuel BECKETT – Mise en scène de Alain Françon avec Serge Merlin au THEATRE DES DECHARGEURS – 3, rue des Déchargeurs 75001 PARIS – du 12 sep 2016 au 1 oct 2016 – Lundi, Mardi, Mercredi, Jeudi, Vendredi, Samedi à 21h30 –

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Texte :

Mise en scène :

Comédien(s) :

Serge Merlin

Lumières :

Décors :

Costumes :

Crédit Photo Visuel :

Peut être n’y a t-il rien à comprendre, le texte se suffit à lui même comme un long tunnel inachevé qu’explore, décrit, commente avec malice, étonnement, un guide à l’attention de ses visiteurs.

Non, nous ne sommes pas dans la grotte de Lascaux, mais c’est tout comme. Et si nous avions affaire à un guide tel que Serge Merlin? nous comprendrions vite que cet étrange commentateur pourrait nous entraîner jusqu’au seuil de l’interdit, en retrait, là où plus personne ne regarde, dans cette curieuse nappe abandonnée par les mots mêmes, une page blanche qui sourit.

Le dépeupleur pourrait être celui-là qui chasse les mots de leur tanière pour faire place nette, un grand homme de ménage en somme.

Le regard de ce guide fait penser à celui d’un chercheur quelque peu désabusé qui décrit l’existence de bestioles dans leur cage. Il continue néanmoins à s’étonner pour le plaisir et puis surtout parce que l’exercice de la description a cela d’exemplaire qu’il doit s’en tenir aux faits et à la circonspection. Certains humains se récrient depuis leur origine sur l’inanité de leur condition : boire, manger, dormir; serait-il possible qu’un observateur géant soit en train de nous examiner comme nous le faisons avec les fourmis sans états d’âme, objectivement. Vues de loin, ces petites créatures ne parlent pas, ne pensent pas mais elles remuent, elles grouillent.

La vision de ce descripteur qui ne désigne par l’humain mais nous le reconnaissons forcément, est plutôt ténébreuse mais voilà, elle se gorge de miel, de gourmandise. Parce que voir c’est jouir aussi. L’interprète Serge Merlin sait si bien l’exprimer cette gourmandise. Il ne lèche pas les mots, il est léché par eux; ce qu’il décrit, il le voit. Il donne l’impression d’être un hypnotiseur de petites bestioles, sa voix suit son regard, et il y a ce vertige d’éprouver les mots aussi vivants sinon bien davantage que les créatures décrites.

Mais, Il n’y a pas seulement que les phrases, il y a leur détournement. Comme si parfois de belles phrases ne servaient qu’à détourner l’attention, Il est possible dans ce texte de passer entre les mots, de circuler, d’imaginer la page cornée et pour un grand comédien comme Serge Merlin qui aime jouer avec les mots de démentir par le jeu, le sens des paroles, en tout cas d’entretenir le doute, comme on entretient le brasier. Il y a eu, c’est évident, un coup de pied dans la fourmilière !

«Harmonie ! » rugit le dépeupleur Serge Merlin, qui allume de toute sa malice, son charisme, ce soliloque énigmatique, un long tunnel inachevé qu’auscultent fiévreusement les spectateurs. La mise en scène d’Alain Françon donne à voir un bac à sable circulaire qui n’attendrait qu’un coup de baguette magique, celle du dépeupleur. Oui vraiment, cela vaut bien une visite à la grotte de Lascaux ou au gouffre de Padirac !

Paris, le 13 Septembre 2016                   Evelyne Trân

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