mise en scène
Avec : Marie-Ange Gagnaux, Yoann Gasiorowski
Il n’y avait pas de drapeau bleu, blanc, rouge, caracolant sa devise « Liberté, égalité, fraternité » ce bel après midi du 25 Juin 2016 au Boulodrome de Bans qui fêtait la 6ème édition des Rencontres Théâtrales du Val d’Amour. Et pourtant tous les témoins qu’ils soient élus de la République, organisateurs du festival, artistes et surtout le public venu en famille, pourront vous assurer qu’il flottait bien dans l’air l’esprit de cette fameuse devise.
Que les sceptiques dessillent leurs yeux, cette devise inscrite, sculptée à même la pierre au-dessus de toutes les mairies de France, s’est reflétée dans l’escarcelle d’un jeune auteur contemporain, co-scénariste et interprète du film « Entre les murs » (palme d’or à Cannes en 2008), François BEGAUDEAU.
« Pour la faire parler » lui a signifié son commanditaire, le metteur en en scène engagé Benoît LAMBERT, de façon inédite au théâtre, lui offrir même un siège, une tribune, à côté des tableaux noirs, face aux lycéens.
Branle-bas de combat pour François BEGAUDEAU qui en dépit de sa notoriété n’entend pas l’utiliser comme professeur d’Éducation civique.
A moins de le mettre en scène ce bougre d’éducateur, de bonne composition, sommé de donner du sens à la devise nationale à un public de lycéens .
Un défi qui tient de la haute voltige, de la cascade idéologique, philosophique, politique etc. Comment ne pas tomber dans la bien-pensance avec un tel sujet . L’homme fait appel à une coach, une Marianne de la République, censée l’aider à grimper tout autour de cette formule impavide qui fait rayonner de ces belles dents, bleues, blanc, rouge, la France dans le monde entier.
Une devise faite pour être déclamée à plein poumons comme si elle surgissait du cœur du peuple, et qui se trouve statufiée au dessus des mairies, exposée aux rangées de pics qui chassent les pigeons. Quel paradoxe ! ?
Et si nous en faisions l’inventaire de cette devise, au premier, deuxième, troisième degré. Si nous la chauffions à blanc !
La faire parler, lui tirer les vers du nez, non cela ne s’apprivoise pas comme ça une devise qui a vraiment l’allure d’une façade qui semble narguer tous ceux mêmes qui voudraient y croire.
François BEGAUDEAU a pris le parti d’en sourire . Le héros de la pièce chargé de « redonner du sens à notre devise, véritable socle moral de la République » a conscience de n’avoir ni le costume ni le décorum, ni la langue de bois adaptée à une telle exigence.
Il a le vertige ! Mais c’est heureux pour le public, il semblerait qu’il ait entendu parler du parti du M.O.U (mouvement ondulatoire unifié) créé par l’humoriste Pierre DAC, candidat à l’élection présidentielle, il y a plus de cinquante ans !
En tout cas, le public a particulièrement apprécié la représentation de cette pièce servie par d’excellents comédiens, dans une mise en scène sobre et efficace de Benoît LAMBERT.
Le spectacle a été suivi d’un débat passionné et contradictoire en présence de l’auteur, du metteur en scène, et de deux philosophes dont l’un est libraire. Que l’on soit tenté de monter au créneau pour avancer ou de rester plus circonspect puisqu’à vrai dire, les notions de liberté, égalité, fraternité seront toujours relatives, l’important en effet est de permettre aux différentes sensibilités de s’exprimer, sinon fraternellement, de la façon la plus conviviale possible. Encore une utopie, et pourquoi pas, quand les utopistes pragmatiques retroussent leurs manches, ils ne prêchent jamais dans le désert. On pouvait donc l’entendre comme un oiseau de Prévert, ronronner ou siffloter dans l’air cette belle devise « Liberté, égalité, fraternité » au boulodrome de Bans, ce Samedi 25 Juin 2016 !
Paris, le 27 Juin 2016 Évelyne Trân