Photo Adrien Berthet
texte Sarah Kane
mise en scène et scénographie Sara Llorca et Charles Vitez
chorégraphie DeLaVallet Bidiefono
musique Benoît Lugué et Mathieu Blardone, régie et diffusion du son Olivier Renet, costumes Emmanuelle Thomas, lumièreLéo Thévenon
avec DeLaVallet Bidiefono, Mathieu Blardone, Sara Llorca, Benoît Lugué, Antonin Meyer Esquerré
Est-il possible de l’exorciser la souffrance psychique par la voie du théâtre, de la danse , de la musique ? Sarah KANE, l’auteure de 4.48 Psychose, considérée comme une véritable auteure dramatique, souffrait de troubles psychiques et se suicida à l’âge de 28 ans dans un hôpital de Londres.
Nous serions enclins à penser que cette pièce en forme de long monologue est largement autobiographique. Le personnage est une patiente d’une clinique psychiatrique en proie à une souffrance existentielle, inextinguible. Elle pressent qu’il n’y a pas d’issue autre que le suicide car les médicaments que lui donnent les médecins ne la soulagent pas, ils ont des effets indésirables, elle a l’impression petit à petit d’être lobotomisée.
Elle exprime le sentiment d’être dans un étau, d’être séparée du monde. Peut être exacerbe t-elle cette souffrance en ne cessant pas de l’ausculter, de l’écouter, de l’entendre. Et pourtant il se dégage de son texte une grande vitalité, une forte charge de sensualité sensuelle, une énergie même si c’est celle du désespoir.
C’est cette énergie qu’ont voulu canaliser les metteurs en scène et scénographes Sara LLORCA et Charles VITEZ qui ont décidé de ne pas parler du destin tragique de Sarah KANE au profit de l’œuvre vivante.
Le spectacle greffé sur les mots de Sarah KANE d’un point de vue esthétique, chorégraphique et musical est d’une incontestable beauté mais il ne reflète pas la véritable atmosphère de l’œuvre, étouffante, anxiogène, douloureuse. Ce que raconte le personnage de 4.48, c’est son enfermement, sa prison intérieure, asphyxiante, son incapacité à se rebrancher avec le monde. Elle est comme un papillon dont les ailes ont été écrasées par un bloc de béton.
Cela dit, ce sont les mots mêmes de Sarah KANE qui inspirent la danseuse et interprète Sara LLORCA, le magnifique danseur DELAVALLET BIDIEFONO et les musiciens Mathieu BLARDONE et Benoît LUGUE.
Sur les traces de Sarah KANE, ils entendent prolonger son parcours, accompagnant sa voix avec leurs propres moyens d’expression, leurs propres rituels.
L’indicible douleur, le chaos intérieur du personnage de 4.48 rejoignent le champ des danseurs musiciens qui forment le chœur astral, la réponse d’amour qu’attendait tant Sarah KANE.
Paris, le 7 Février 2016 Evelyne Trân