Avec Jacques BOUDET et Maxime LOMBARD
- Création lumière Alexandre ICOVIC
- Décor Claire VAYSSE
- Son Renaud DUGUET
C’est extrêmement réaliste, encore mieux qu’au cinéma, on se croirait dans un scène d’un polar de Simenon. Existent-ils encore ces taudis-hôtels des années cinquantaine qui servaient de niches aux voyous ou aux filles de joie ? C’est assez curieux mais la chambre qu’occupent les deux héros du Monte-plats de PINTER, semble refléter leur propre usure.
Qui sont ils ? Des personnes apparemment ordinaires qui attendent, n’en finissent pas d’attendre dans cette pièce peu avenante, sans fenêtre, équipée tout de même d’un WC et d’un coin cuisine.
Qu’attendent ils ? Ils attendent des ordres de leur employeur . Tous les détails ont leur importance dans la mise en scène , tous les gestes aussi. Ben légèrement affalé sur un lit de camp lit le journal. Gus quant à lui ne cesse de râler . Les deux hommes, des tueurs à gage, collègues de travail, se comportent comme un vieux couple. Ils se chamaillent pour des vétilles. Il faut bien passer le temps, il y a de l’anxiété dans l’air, les ordres ne viennent pas et les deux hommes finissent par se demander s’ils ne sont pas tombés dans un traquenard. C’est à ce moment là que le monte-plats intervient apportant avec un bruit d’enfer à chaque montée une nouvelle commande de plats qu’ils sont bien incapables d’honorer.
Nous n’en dirons pas plus car le suspense, les interrogations, les angoisses qu’éprouvent les deux hommes sont partagés par le public…
Harold PINTER porte un regard plutôt tendre sur ces deux hommes C’est le corps de pauvres bêtes, de pauvres humains, qui parle de façon tout à fait prosaïque. Tout se rapporte au corps, à son bien être surtout lorsqu’on se retrouve enfermé quelque part… Tout ce qui cloche prend des proportions invraisemblables. Si les corps des deux hommes devenus hypersensibles au moindre bruit, crient leurs misères, leurs faiblesses, l’irruption du monte- plat résonne comme une semonce complètement abstraite contre laquelle ils se trouvent absolument démunis.
Il n’est rien besoin de souligner . Nous voyons vivre les deux hommes, éprouvons de l’empathie à leur égard, rions de leurs tracasseries matérielles, jusqu’au bout, le bout de leur vie qui est celle aussi de la pièce.
Les deux comédiens rendent vraiment attachant ce vieux couple. Jacques BOUDET incarne un Gus fatigué et vulnérable, plein de bonne volonté par contraste avec le personnage de BEN plus vif mais plus sec et autoritaire, interprété par Maxime LOMBARD.
Belle farce métaphysique tout à fait croustillante, servie par d’excellents acteurs et la mise en scène très éloquente de Christophe GAND. A ne pas manquer !
Paris, le 12 Novembre 2015 Evelyne Trân