Conception, marionnettes, jeu : Yeung Faï ; Mise en scène : Grégoire Callies ; Scénographie : Jean-Baptiste Manessier ; Construction : Éric Jolivet ; Musique : Thomas Demay ; Lumière : Boualème Bengueddach ; Conseiller artistique : Thierry Tordjman ; Production : Cie Le Pilier des Anges – Théâtre du Chemin Creux ; Diffusion : T.Tordjman / T&T Productions ; Photo : Eric Didym
Une table comme un établi avec plusieurs panneaux coulissants castelet cubique lumineux, écritoire, théâtre pour maison de marionnettes, voilà juste ce que possède le marionnettiste qui raconte la difficulté d’exercer son art en Chine. La mise en scène de Grégoire Callies et la scénographie de Jean Baptiste Manessier séduisent par leur sobriété.
Ce sont les marionnettes, elles mêmes, à travers quelques saynètes rebondissantes qui témoignent des événements politiques et culturels qui ont transformé la Chine au cours du vingtième siècle, de façon fulgurante.
Mettons nous dans la peau de ces marionnettes agitées avec une dextérité inouïe par Yueng Faï pour imaginer leur trouble existentiel. Exercées à jouer des scènes de vaudeville dans leurs costumes précieux, il leur a fallu endosser l’accoutrement grossier des guerriers de la guerre de Corée puis mimer leur amour indéfectible pour Mao et enfin troquer leurs gracieuses figures pour des bonnets de Mickey au karaoké !
Les marionnettes pour subsister ne doivent elles pas rester en phase avec leur temps, quitte à perdre leur âme et devenir des marchandises à deux sous ?
C’est un cri du cœur de Yueng Faï qui se met en scène avec ses compagnes . Son spectacle a l’allure d’un poème vivant animé par des créatures qui a vrai dire ne soucient guère du temps qui passe. Il suffit de prendre à témoin les belles colonnes calligraphiées en caractères chinois pour se dire que si l’art de la calligraphie se transmet depuis des millénaires, l’art de Yueng Faï, le peut aussi, étant de même essence poétique et raffinée.
Comme c’est bizarre, Yueng Faï coiffé d’un chignon à l’ancienne,et ses marionnettes caméléon, ma foi, fort combatives, respirent la jeunesse !
Paris, le 28 Septembre 2015 Evelyne Trân