- Auteur / Metteur en Scène :
Alain Ubaldi - Directeur technique / Créateur lumière :
Thomas Falinower - Scénographe associé :
Wilfrid Roche - Conseiller littéraire et artistique :
Estelle Gapp
Un homme qui vient d’être licencié pour dix minutes de retard à son poste de travail exprime dans un monologue intérieur, le sentiment terrible d’être soudain coupé du monde. La douleur est morale . Elle réveille toutes les blessures antérieures, elle est pernicieuse, lancinante et surtout elle n’a pas d’autre interlocuteur que le sujet lui même .
C’est toute sa conscience du lendemain qui se trouve subvertie, c’est le trou noir. Il est devenu un point noir autour duquel le monde tourne sans le voir. Il se trouve effacé d’une page où il a joué sa vie sans y penser et se retrouve seul face à lui même.
Est-il possible de faire retentir le bruit de la solitude ? L’auteur semble vouloir atteindre le la d’une solitude qui se peuple progressivement de toutes sortes de souvenirs. Tout d’abord c’est une voix off qui tire le rideau de la pénombre où l’on voit se mouvoir un homme devenu une ombre. Cette voix off se dresse comme un mur de paroles, impassible, monocorde qui contraste avec la vision d’un homme quelconque, juste une silhouette.
Et puis c’est autour de la silhouette de prendre corps, soudain on entend la voix sortir de son corps, cette voix que le spectateur attendait. La chair éclate, on la voit s’éclater, s’éclabousser comme perforée par des pensées qui s’entrechoquent dans le tumulte d’une émotion incontrôlable. Pour se contenir, l’homme rapproche sa voix qui se dépêche vers l’extérieur de celle qui est enregistrée dans un magnétophone. Va t-il devenir la toupie de ses émotions, dans quel but ?
La mise en scène est organisée autour de plusieurs figures du même homme, qui devenu le centre de son propre monde, doit bien pouvoir bénéficier de ses instances temporelles, le jour , la nuit grignotées par l’aube et le crépuscule.
La mise en scène devient un axe de l’écriture pour devenir une ancre . Sans doute s’affiche t-elle trop, presque brutalement.
L’interprète, Stéphane SCHOUKROUN est étonnant, nous l’avons pris pour l’auteur lui même , tour à tour, effacé, chaotique, offensif.
A travers, l’écriture de Alain UBALDI, nous pouvons éprouver combien les pensées d’un homme travaillé par la souffrance, ne suivent pas la grammaire d’un monde auquel pourtant nous sommes assujettis. Faut-il croire qu’il n’y a que les trains qui ne déraillent pas ?
Pensées retournées, essoufflées, amputées, amochées, dans le brouillard, sur nos rails, qui tentent d’exulter malgré tout sous le soleil. Belle illusion théâtrale !
Paris, le 21 Septembre 2015 Évelyne Trân