FAIRE DANSER LES ALLIGATORS SUR UNE FLUTE DE PAN : CELINE et Denis LAVANT au Théâtre de l’Epée de Bois du 13 Mars au 15 Avril 2012

 Théâtre de l’Epée de Bois  Cartoucherie – Route du Champs de manœuvre 75012  Paris –

 Du mardi au samedi à 21 H. Dimanche à 16 H.

Un spectacle composé par Emile BRAMI d’après la correspondance de Louis Ferdinand CELINE. Mise en scène et direction d’acteur : Yvan MORANE

En découvrant ce portrait hallucinant de CELINE interprété par Denis LAVANT, l’on ne peut s’empêcher de penser  que cet homme était un personnage de théâtre aussi monstrueux qu’un Richard III ou un Roi Lear. C’est une révélation parce que cela bouleverse l’idée que nous nous faisons de l’écrivain en général toujours trop sage, planqué à l’intérieur de ses livres. L’écrivain CELINE est un artiste et un homme. Il revendique sa vérité charnelle, avec une violence qui n’est pas sans rappeler celle d’Artaud. CELINE a écrit une pièce de théâtre qui a été refusée par les éditeurs. Son théâtre il l’a transposé dans des romans qui dépassent aussi l’idée que nous nous faisons du roman. Comme si CELINE était toujours au travail, au sens noble du travail, celui qui passe par la perception, la conscience, l’engagement et surtout pas la routine.

Emile BRAMI a composé un spectacle à partir d’un choix de correspondances de CELINE où il parle de son rapport à l’écriture. Il s’exprime comme un déchainé, un lion en cage, il parle de l’écriture comme d’une maitresse et quand il dit :  « Je ferai danser des alligators sur ma flute de pan » c’est qu’il ne la veut pas soumise l’écriture, il la veut émotive, aussi  vivante qu’un tableau. Il y a des moments aussi où il fait penser à Frankenstein car c’est tout de même incroyable cette volonté de vouloir pétrir l’écriture comme la chair. CELINE était aussi médecin, médecin des pauvres à CLICHY LA GARENNE. Il a fait la guerre de 14. Alors la chair, il connait,  aussi bien celle des morts que celle des vivants. C’est une expérience à laquelle n’importe quel humain ne peut pas songer sans douleur.

 De fait Denis LAVANT ne joue pas CELINE. Il est CELINE, sa fureur, ses tripes, sa peau, son imagination aussi car il a une façon de bouger spectaculaire comme si les images de CELINE il fallait qu’elles gambadent aussi sur la scène. Mais c’est le corps qui les invente, c’est fantastique comme le rêve pris dans les rets du réel.

 Dans le fond, on a l’impression d’assister au travail de création d’un artiste dans une chambre obscure, celle de la solitude, lorsqu’il déballe ses fantasmes. Quand il jette pêle mêle  les livres de ses contemporains en les traitant de tous les noms, ne serait-ce pas avec l’idée secrête d’en extraire la substantifique moelle pour la pétrir à sa façon.

 La scène de l’Epée de bois pourrait presque faire penser à un vaste grenier dont les objets seraient tous familiers. Le metteur en scène a simplement voulu donner une scène, un espace à l’écrivain pour qu’il devienne à son tour un personnage de théâtre et c’est réussi grâce à Denis LAVANT, indomptable CELINE. C’est vrai qu’avec CELINE, on ne peut s’empêcher  de croire que le mot création dérive du mot chair. Souvenons-nous tout de même que dans l’œuvre de cet écrivain, le meilleur conspire contre le pire.

Aux spectateurs qui ne sont pas fervents du « seul en scène » j’objecterai qu’il ne s’agit pas d’un monologue mais d’une course à l’écriture trépidante, mouvementée et forte en gueule. Un spectacle de nature à séduire même les enculeurs de mouche, c’est rare !

  2  AVRIL 2012                                 Evelyne Trân

3 commentaires sur “FAIRE DANSER LES ALLIGATORS SUR UNE FLUTE DE PAN : CELINE et Denis LAVANT au Théâtre de l’Epée de Bois du 13 Mars au 15 Avril 2012

  1. Je suis du pays des alligators … et je les imagine dansant au rythme de la musique des flutes de paon. Image bien romantique et douce loin de Celine. Ici dans le Sud des USA, on mange l’alligator (alligator on the stick).
    Je n’ai jamais lu Celine parce que je sais qu’il est capable du meilleur comme du pire. Mais effectivement, j’imagine bien l’enormite de la presence de cet ecrivain, le cote charnel, enorme, violent. Je pense qu’il aurait aime la Louisiane, pays des cajuns a la nature si dure, antipathique au premier abord, sauvage… et mysterieuse.

    J’aime

    1. Je vous encourage vivement à lire CELINE. Notamment le voyage au bout de la nuit ou Mort à crédit.
      Vus m’en direz des nouvelles. D’aileurs, le spectacle avec Denis LAVANT nous donne envie d’aller plonger dans l’univers de ce personnage
      si haut en couleurs.

      Envoyez moi s’il vous pl ait une photo d’alligator.

      Bien cordialemnet

      Evelyne Trân

      J’aime

      1. Je suivrais votre conseil.
        Je peux aussi meme vous faire un montage photo avec un alligator et des flutes de pan eventuellement. D’ailleurs, cet apres midi, nous guidons un ami francais et on ira peut etre dans un parc pres de Houston ou il y a des alligators.
        Cela se mange en brochettes avec sauce epicee … car c’est une viande fade …

        J’aime

Laisser un commentaire