
Mise en scène Tristan PETITGIRARD
Avec Françoise CADOL
COMÉDIEN VOIX OFF : DAVID KRÜGER
MUSIQUE : ROMAIN TROUILLET
LUMIÈRES : DENIS SCHLEPP
COSTUME : ALICE TOUVET
DÉCOR : PAULINE GALLOT
ASSISTANTE A LA MISE EN SCENE : BERANGERE DE POMMEROL
La femme qui ne vieillissait pas. On pourrait broder à l’infini sur ce thème. Qui ça on, moi, vous ou personne si l’on préfère rester anonyme. J’ai essayé de renverser le genre en songeant à l’homme qui ne vieillissait pas. Je constate que je suis bien moins intriguée. Depuis la nuit des temps, la femme suspendue au regard de l’autre mâle ou femelle, se pique à la rose d’un certain Ronsard ou d’un certain Baudelaire qui se vengent de sa beauté inaccessible en racontant sa future déchéance inexorable, celle de la vieillesse et de la mort.
Personnellement dans le conte de Blanche neige et les 7 nains, c’est le personnage de la Reine, se regardant dans le miroir pour l’entendre lui affirmer « Vous êtes la plus belle femme du royaume » que je trouve le plus fascinant. Surtout quand on la revoit déguisée en vieille sorcière.
Si la beauté n’était pas gage de pouvoir, lui accorderait-on autant d’importance ? Je me souviens d’une parole qui m’avait choquée émanant d’un prof de sciences naturelles qui exprimait son dégoût pour les vieilles femmes, j’avais 12 ans et je me demandais « Comment cela est-il possible ? ».
Grégoire DELACOURT, l’auteur du roman « La femme qui ne vieillissait pas « dont est tirée la pièce éponyme adaptée par Françoise CADOL déclare : À sa manière, et dès sa sortie en 2018, La femme qui ne vieillissait pas était un combat des femmes : le refus de l’injonction d’être toujours jeunes .
Mais que se passerait-il si elle ne vieillissait pas pour de bon cette femme. Oseriez-vous l’imaginer ? Le sort en est jeté. Une femme réalise un rêve qu’elle ne prenait pas au sérieux et qui la surprend elle-même autant que son entourage.
Le conte débute lorsque l’héroïne devient une des cobayes de l’expérience d’un sorcier photographe qui a décidé de fixer le passage du temps sur les visages en les photographiant toujours dans la même position chaque année. Elle est l’exception qui confirme la règle : le passage inexorable du temps.
Nous l’entendons évoluer de la prime jeunesse à l’âge mûr sans que ses traits extérieurs se modifient. Le fait de ne pas changer extérieurement va finir par bouleverser ses relations avec ses proches et devenir un handicap. Et ce qui est particulièrement intéressant c’est le ressenti de cette femme qui sait qu’intérieurement, elle change mais que son évolution n’est pas perceptible au regard des autres.
Françoise CADOL incarne avec une sensibilité à fleur de peau une femme, simplement une femme. N’est-ce point un désir innocent et bien naturel que celui de rester jeune et belle pour se plaire ou plaire à l’être aimé ? Mais prendre conscience de son vieillissement, c’est cruel et cela vaut aussi bien pour le genre masculin et l’espèce animale, avez-vous vu ce pauvre chat qui traine la patte ?
Il pèse vraiment très lourd ce regard sur la vieillesse ! Le conte finit bien grâce une légère ondée à l’eau de rose, il ravira les esprits optimistes et celles qui décideront après le spectacle de faire l’économie de leur crème anti-rides !
Est-ce bien sérieux de se préoccuper de son apparence quand le monde va si mal ? Mais c’est humain, messieurs, dames, restons humains !
Françoise CADOL est fabuleuse dans ce seule en scène où toute en finesse elle fait front face au monstre, le terrible appareil photo qui va trahir votre vieillissement !
Le 21 février 2023
Evelyne Trân
Article initialement publié sur LE MONDE LIBERTAIRE.FR