Horváth, apatride de Matéo Troianovski à la Comédie nation 77 Rue de Montreuil 75011 PARIS du 12 au 20 Novembre 2021, les vendredis à 19 H, les samedis à 18 H 30.

Mise en scène : Elie Rofé
Avec Fanny Le Pironnec, Juliette Derkx, Matéo Troianovski

« Je n’ai pas de pays natal et bien entendu je n’en souffre aucunement. Je me réjouis au contraire de ce manque d’enracinement, car il me libère d’une sentimentalité inutile… »

« Le concept de patrie, falsifié par le nationalisme, m’est étranger. Ma patrie c’est le peuple. »

 Ainsi se présente Ödön von Horvath, né à Fiume le 9 décembre 1901, près de Trieste sur l’Adriatique, dans l’empire austro-hongrois qui sera démembré en 1918. Son père étant diplomate, il grandit dans différentes villes : Belgrade, Budapest, Vienne, Presbourg, Munich.

Balloté entre plusieurs pays et plusieurs langues, il se déclarera lui-même comme un pur produit de l’empire Austro-Hongrois – qui avait réuni plus de 200 nations – Un commentateur dira de la patrie d’Horvath qu’elle est utopique. Elle s’appelle : liberté.

Ecrivain d’expression allemande (Il est auteur de 17 pièces et de quelques romans dont Jeunesse sans Dieu), il décide d’écrire très tôt, ses premières publications datent de 1922. En 1927, a lieu la création de Révolte à la cote 3018 à Hambourg et une nouvelle version en 1928 sous le titre. Le Funiculaire (inspiré d’un fait divers) à Berlin.  Une maison d’édition lui offre un contrat qui lui permet de vivre de sa plume. Il recevra le prix Kleist pour la pièce légendes de la vie viennoise à Berlin. Sa notoriété grandissante coïncide avec l’avènement du nazisme et l’arrivée d’Hitler au pouvoir. Ses écrits font l’objet d’un autodafé et il doit s’exiler.

C’est tout de même une gageure que celle de mettre en scène la vie d’un écrivain tel qu’Horvath. Chez cet écrivain, la vie et l’œuvre sont étroitement liées. C’est ce que met en évidence Matéo Troianovski , l’auteur de la pièce Horvath l’apatride qui relate son parcours d’écrivain résistant, parsemé d’embûches, en y incluant sa relation amoureuse avec une comédienne Hertha Pauli. Un personnage qui est selon l’auteur, un lien entre le rêve et la réalité, l’aspect conscience de la pièce.

Interprété par Matéo Troianovski, Horvath apparait comme un jeune homme « bélier » consumé par l’œuvre qu’il est en train de créer. Du coup, la personnalité d’Hertha Pauli par contraste ne diffère pas de l’ordinaire et de cette fameuse réalité qui permet de garder les pieds sur terre.

Le spectateur reste suspendu aux paroles du jeune homme qui incarne la fébrilité de la jeunesse, sa vitalité. Oui, dans Horvath coulait le sang d’un révolutionnaire !

Sans doute, l’auteur veut-il aussi signifier qu’Horvath était également un jeune homme comme les autres qui n’entendait que vivre libre. Les circonstances seraient responsables de sa révolte et de ses combats d’écrivain dont les écrits ont tout de même fait l’objet d’un autodafé, un événement absolument choquant pour un jeune dramaturge.

Nous saluons le jeu des comédiens, très justes et la mise en scène d’Elie Rofé. Sobre et fluide, elle adoucit la perception du personnage d’Horvath. De sorte que la pièce ne revêt pas un caractère didactique, elle parle aussi à l’imaginaire d’une époque révolue dont nous gardons des traces grâce notamment à la musique.

Le décor, celui d’une pièce de vie réduite à son strict minimum, bureau et vieille machine à écrire reflète la précarité matérielle de l’écrivain mais aussi sa seule préoccupation, l’écriture.

 Les circonstances de la mort d’Horvath, survenue le 1er Juin 1938, ajoutent encore au caractère romanesque et tragique de sa vie. Lors d’une escale à Paris, venant d’assister à une projection de Blanche-Neige de Walt Disney (né le 5.12.1901), il est fauché par la branche d’un marronnier foudroyé devant le Théâtre de Marigny. Faut-il que le destin soit aveugle ou ironique ?

Par sa vibrante mise en scène, le spectacle donne furieusement l’envie de découvrir ou redécouvrir Horvath l’apatride dont l’engagement contre le fascisme ne peut que nous interpeller hélas de nos jours.

Paroles de jeune, paroles d’aujourd’hui :

« Je ne me soucie pas de ce qui peut arriver, je me soucie seulement de ce qui ne devrait pas être ». « Il ne se peut pas que l’individu ne joue aucun rôle. »

Eze, le 12 novembre 2021

Evelyne Trân

N.B : Article également publié sur le site du Monde libertaire

https://monde-libertaire.net/index.php?articlen=6093

Elie ROFE était l’invité de l’émission DEUX SOUS DE SCENE en 2ème partie sur RADIO LIBERTAIRE 89.4, le samedi 13 Novembre 2021, en podcast sur le site de RADIO LIBERTAIRE.

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