JEANNE PLANTE EST CHAFOUIN. Théâtre Lepic – 1 Avenue Junot 75018 PARIS – Paris. Dernière le 16 décembre à 20h30. Dès janvier 2020 en tournée dans toute la France – Par Laurent Gharibian –

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Après six lundis, répartis sur quatre mois, au Théâtre Lepic, le spectacle sera prochainement en tournée dans toute la France. Une belle occasion, pour un public averti et curieux d’assister à un moment rare d’humour explosif, insolite et légèrement transgressif…Comme annoncé, il s’agit, bien plus qu’un tour de chant, d’une vraie « fantaisie musicale » peu conventionnelle aux allures de numéro de cabaret kitschissime. Le triomphe, à l’Européen, en mars 2019, aura laissé des traces durables. 

Deux albums « Les mots cachés » en 2009 et « La veuve araignée » en 2012 avaient apporté à la comédienne, danseuse et musicienne la pleine reconnaissance comme auteure-compositrice-interprète. Suivaient le livre-disque pour enfants  « Farces et attrapes » en 2016. Et le CD « Jeanne Plante est chafouin » fin 2018.
 La confirmation sur scène est éclatante. Des arts de la scène Jeanne Plante connaît les secrets. Elle apparaît en robe longue fendue, rouge pailletée, en décolleté super sexy. Coiffée d’une inénarrable perruque rouquine. Un ensemble cohérent qui ne saurait, un seul instant, détourner son auditoire de ce regard clair, suggestif. Voix sensuelle, beau médium, diction parfaite – à souligner par les temps qui courent – l’artiste capte d’emblée l’attention.
Avec ses mots d’auteure aux mille facettes et ses musiques idéalement adaptées à sa tessiture, Jeanne Plante bâtit un univers à nul autre pareil : expressif, décoiffant et d’une acuité sans concession faisant naître les rires complices. Dans ce langage, aucune afféterie : crudité, franchise, naturel. Une observation au scanner des doutes, contradictions et espoirs d’une femme gourmande. Jamais rassasiée dans sa recherche de plaisirs sensuels, d’amour total, en vérité.
Et l’émotion surgit, inattendue, inscrite en parcelles dans cette fresque surréaliste, touchante et  ancrée dans le quotidien. Mais tournée tout autant vers les bonheurs fantasmés…
En quinze chansons originales et  trois reprises, Jeanne se raconte et, ce faisant, retourne vers le public un miroir virtuel. Sans tain. En ouverture « Chafouin » donne le ton : carte de visite affirmative, évocatrice. Il faut écouter chaque mot et chaque silence du titre « Je jouis » – cosigné avec Fred Raspail. Cela sonne à la manière d’un hymne libérateur pour ne pas dire libertaire. Cette chanson serait sûrement interdite dans de nombreux pays…La transgression en toute majesté. On est prévenus. 
Trois reprises, donc, avec une découverte : l’étonnant  « Sex Mad » – du regretté Eric Robrecht.  La seconde « Cocuage et crustacés » aux paroles réécrites par Vincent Roca sur l’immortelle mélodie de Gérard Bourgeois : ou comment revisiter, façon iconoclaste, un classique que l’on reconnaît bien vite. La troisième, ce 2 décembre, c’est un irrésistible « Le chanteur » interprété en duo avec Askehoug, voix de cuivre, présence dynamisante… Daniel Balavoine a dû bien rigoler de là haut. C’est ainsi, Jeanne Plante aime à respecter la tradition du music-hall en invitant un interprète différent à chaque représentation. En mars, à l’Européen c’était Alexis HK.
L’énoncé des titres illustre un humour ravageur à peine teinté de spleen : « Le détail qui tue », « Le bouton de ta veste », « La chieuse des vacances » entre autres… En peintre du sentiment amoureux décliné sous l’angle de l’autodérision, Jeanne Plante s’en donne à coeur joie : la mise en scène de Patrice Thibaud, alerte et précise, souligne en finesse la tendresse poétique comme la folie douce d’un personnage se révélant, au fil des chansons, finalement assez proche de nous. Tous sexes confondus…Il faut bien le reconnaître…
Après un intermède instrumental, au mitan de la représentation, Jeanne réapparaît tout de noir vêtue, collants et pull moulant, cheveux nature à la garçonne. Craquante. Effet de contraste réussi. Et toujours ces titres comme « La vie c’est jamais comme on veut » ou « Les mots qui touchent ». Tout un poème.
Les trois musiciens accompagnateurs se font par moments comédiens ou chanteurs. Aux percussions (des casseroles !) Jacques Tellitocci assure vraiment. En subtilité. Et pour un titre, dont il est l’auteur, se révèle crooner, rital et un peu macho. Ca marche. Jérémie Pontier brille aux claviers. Lui aussi fait son numéro, imitant Ray Charles et Stevie Wonder : drôle mais léger comme il se doit. Philippe Desbois -guitalélé (!) et violoncelle – en chevelu qu’il est se voit dédier-un genou à terre- un titre composé pour lui seul et qu’interprète avec délice notre simili-dominatrice.
Ces trois-là sont étroitement associés au succès de « Jeanne est chafouin ». Equipe soudée, belles vibrations. Tous ont joué avec les très bons. Adamo, Agnès Bihl, Bertrand Belin, Holden pour le premier. Sanséverino, Clarika,Yves Jamait, Jeanne Cherhal pour le second. Art Mengo, Bernard Lavilliers, Louis Chédid, Jean- Louis Aubert pour le troisième larron. Cela s’entend. Cela se voit. On pourrait imaginer un album en trio. Un probable carton, là aussi…
Jeanne Plante termine avec « Une dernière chanson ». Toujours logique, mine de rien, notre fantaisiste. Un bijou manifestement attendu par les fans de la première heure. Pour ce faire elle est descendue de scène et plaisante avec les spectateurs. Sourire radieux.
 Pour résumer, il nous semble bien qu’il y ait la verve acérée et tendre d’un Wolinski chez cette femme d’esprit. Par ailleurs sanguine (et fort) joli fruit : si elle avait croisé Prévert, Jeanne Plante aurait bien pu inspirer cette chanson au poète de l’amour, de l’amitié comme de l’irrévérence… Allez savoir !!!
                                                                                              Laurent Gharibian   
Spectacle vu en 2019 à Paris (L’Européen, 20 mars ; Théâtre Lepic, 2 décembre). En tournée dans toute la France, saison 2020/ 2021 et plus si affinités.

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