Déshabiller du regard celle ou celui qui vous fait tourner la tête, peu s’en faut avec le sieur Sacha Guitry qui préfère jouer au chat et à la souris avec ses personnages en donnant le plus souvent le grand rôle à la souris. L’on sait que le chat aime à s’amuser longuement avec sa proie avant de l’ingurgiter.
Dans les trois pièces Une lettre bien tapée… Une paire de gifles… Un type dans le genre de Napoléon… aussi vives que des courants d’air que nous sert la pétillante Isabelle Toris Duthillier, l’homme et la femme seront toujours sur la même onde, celle du désir. Pas question de se prendre au sérieux, faute quoi aurait lieu la douche froide.
Chacune des pièces doit être perçue comme les préliminaires à une future rencontre amoureuse ou plus crûment à un coït.
La femme assume son rôle de poule pimpante qui glousse face à l’homme qui doit le plus souvent lustrer sa crête de coq.
Dans son emploi, du moins dans l’univers de Guitry, la femme est toujours Reine car l’homme ne peut se passer d’elle et cette fieffée femme en profite ! Mais d’où vient donc sa réputation de misogyne ?
Un des points communs des trois pièces est l’élément de surprise, c’est à qui saisira la perche que lui tend « innocemment » l’autre. A cet égard une paire de gifles est géniale, elle requiert une certaine accoutumance à la rouerie distillée de façon infinitésimale toujours sur le fil d’un désir qui s’éblouit lui-même.
Une paire de gifles c’est une rencontre entre Célimène et Alceste revisitée par Guitry. Mais l’homme et la femme ne sont tout de même pas des bêtes, il y a une fichue pointe de cérébralité dans l’expression de leurs désirs !
Patrice Faucheux et Laurent Schteiner excellent dans leurs rôles de chats matois et Isabelle Toris Duthillier est irrésistible en femme allumeuse.
Un spectacle éclaboussant d’esprit et de gaieté ! Quoi, vous avez cru assister à des combats de coqs et de poules dans un poulailler de théâtre ? Fichtre, la nature humaine est-elle donc si comique ? En tout état de cause, Guitry en chef d’orchestre du désir, fait sien cet aphorisme de Pascal « Qui veut faire l’ange fait la bête » ou vice versa ! C’est hallucinant !
Paris, le 11 Décembre 2019
Evelyne Trân