LA LEGENDE D’UNE VIE de STEFAN SWEIG AU THEATRE MONTPARNASSE – 31 RUE DE LA GAITE 75014 PARIS – Du 12 septembre 2018 au 11 janvier 2019 – Du mardi au samedi à 20 H 30 – Matinées samedi à 17 H et dimanche à 15 H 30 –

Distribution :

Natalie DESSAY, Macha MERIL, Bernard ALANE, Gaël GIRAUDEAU, Valentine GALEY

 

Les légendes font partie de notre environnement impressionniste. Qu’un artiste renommé croie ou non à la postérité de ses œuvres, il y aura toujours des admirateurs passionnés, des proches, des amis pour forger sa légende.

 Nous n’avons pas d’autres ailes pour échapper au quotidien morose que les lustres des artistes qui éclairent, subliment nos émotions, nous stimulent.

 A priori, le thème de la pièce de Stefan SWEIG, écrite en 1919 est très éloigné de nos préoccupations immédiates. Il y est question d’un héritage spirituel d’un grand écrivain poète auquel s’est consacré sa veuve, n’hésitant pas à idéaliser le portrait de son époux dont l’aura a pour effet d’éclipser le fils qui doit se battre pour affirmer sa propre personnalité. C’est la rivale de sa mère, le premier amour de son père qui apportera du grain à son moulin en lui révélant que son père était certes un grand artiste mais pas aussi lisse et vertueux que sa légende.

 Légende contre réalité ? Stefan SWEIG s’est toujours attaché à traduire les histoires intérieures des individus, celles justement qui ne risquent pas de passer à la postérité. Il sait probablement par expérience combien les façades luxueuses trop rutilantes, n’ont de valeur qu’à l’extérieur.

 Le maquillage ne tient pas sous la plume de cet auteur, à l’écoute des voix étouffées, écrasées par les clairons de la bienséance,  destinés à repousser dans l’ombre, à l’écart, toux ceux qui pourraient ternir le tableau.

 Mais quel tableau ? Celui d’un salon bourgeois prêt à accueillir les invités d’une lecture littéraire des œuvres du fils que sa mère entend rattacher à la mémoire du père. Or le fils se rebelle car il sait qu’il fait tache, que le vernis de la légende du père n’a rien à voir avec lui, jeune écrivain débutant, en proie aux doutes, amoureux d’une femme d’origine modeste qu’il n’ose pas présenter à sa mère.

 Très progressivement, l’auteur laisse glisser le portrait du père qui ne tient plus qu’à un crochet celui de son épouse. Livrés à eux-mêmes, enfin libérés du leurre qui les égaraient, les protagonistes pourront parler d’avenir, moins ambitieux certes, mais vivant. Une façon de dire que pour marcher droit il faut regarder sous ses pieds et ne jeter un coup d’œil aux étoiles que modérément.

 La pièce, à notre sens, manque de rythme. Son intérêt réside principalement dans les portraits des personnages et les dialogues.

 La caricature n’est pas de mise. Il s’agit d’un drame intime, une joute quasi métaphysique entre des vivants et un mort. Et puis, il y a ce dénouement incroyable, la réconciliation entre les deux rivales amoureuses, l’épouse et l’amante.

 Natalie DESSAY est tout simplement bouleversante dans le rôle de la mère et épouse castratrice. Gaël GIRAUDEAU possède un jeu très nuancé qui lui permet d’interpréter avec véhémence mais sans violence, ce rôle ingrat du fils égratigné par l’image du père. Bernard ALANE est parfait en témoin proche de la famille et Valentine GALEY campe avec une belle vivacité la sœur.Quant à Macha MERIL elle nous est apparue délicieuse dans ce rôle de premier amour du poète, piquante, effrontée, rêveuse, toujours charmeuse.

 Vraiment un beau spectacle servi par une distribution brillante, la mise en scène sobre de Christophe LIDON. Le décor de Catherine BLUWAL, abstrait, géométrique y apporte sa touche intrigante et mystérieuse. Sonder les mystères de l’âme humaine fut toujours le propos de Stefan SWEIG, avec une brûlante délicatesse.

Paris, le 7 Octobre 2018

Evelyne Trân

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