Ecriture et mise en scène Jean-Michel d’Hoop
Assisté de François Regout
Avec Léone François Janssens, Léa Le Fell, Héloïse Meire, Corentin Skwara
et Benjamin Torrini
Vidéos Yoann Stehr
Musique Pierre Jacqmin
Scénographie Olivier Wiame
Marionnettes Ségolène Denis assistée de Monelle Van Gyzegem
Lumières Xavier Lauwers
Il y a déjà 32 ans survenait la catastrophe nucléaire de Tchernobyl à Pripiat précisément, une ville devenue fantôme. L’équipe de Point Zéro s’est déplacée en Ukraine et en Biélorussie pour recueillir les témoignages des habitants, empruntant la même démarche que la journaliste et écrivaine Svetlana Alexievitch.
Les personnes qui sont revenues dans les zones toujours contaminées, se nourrissent généralement de la culture de leur potager, en connaissance des risques sur leur santé. Toutes sont fragilisées et ont un de leurs proches atteints de maladies qui touchent également la nouvelle génération. Seuls les animaux dont la durée de vie n’excède pas 15 ans n’auraient pas le temps de développer des maladies.
La force du spectacle est la douceur de son approche. Nous sommes bien loin du bruit et de la fureur comme si l’ampleur de l’accident nucléaire qui a provoqué la destruction de plusieurs villages, la mort de centaines de milliers de personnes, devait laisser place au silence, au deuil, aux effarantes visions captées par quelques vidéos – maisons abandonnées brutalement le lendemain de ce 26 Avril 1986, poupées, débris de masques à gaz jonchant le sol, auto tamponneuses rouillées, au milieu d’une végétation sauvage, de paysages forestiers splendides – permettant aux spectateurs d’appréhender ce passé encore si proche qui jouxte le quotidien de la population.

Cela qui ne peut pas se dire qui porte le poids de l’innommable, de l’invisible mal, est exprimé par la présence de marionnettes imposantes qui portent toutes les stigmates de l’effroi, de la souffrance figée, et se déplacent pendant les témoignages des habitants qui veulent croire que la vie a repris ses droits, malgré tout, et qui assurent et c’est terrible « On s’habitue à tout ».
La vérité c’est que la plupart des gens n’ont pas le choix, certaines se sachant de toute façon contaminées, préfèrent poursuivre leur vie sur leurs terres plutôt que dans un environnement étranger. Et la maladie qui les guette ainsi que leurs enfants, fait partie du quotidien.
Les déchets radioactifs contenus dans le sarcophage du réacteur de Tchernobyl, ont une durée de vie d’au moins 100.000 ans. A mémoire d’homme, cela reste inimaginable.
Le recours à un autre espace-temps, celui de l’imaginaire, du ressenti, fortifie néanmoins la notion d’humain. Il est frappant d’entendre que les victimes n’attendent de la vie que l’essentiel, se suffisent d’un potager.
Sommes-nous nous déjà à des années-lumière de leur mode de vie, de leur pauvreté ? Avons-nous oublié que le nuage radioactif s’est répandu dans toute l’Europe ?
Ne faut-il pas être vivant pour être saisi par l’effroi de cette catastrophe et d’autres à venir. Quels morts pourraient en rendre compte, sinon par l’intermédiaire des songes.
