UN COEUR MOULINEX de Simon Grangeat – Mise en scène de Claude Vialat – Au Théâtre de l’Opprimé – 78 Rue du Charolais 75012 PARIS – Du 08/11/2017 au 26/11/2017 à 20 H 30 – Du mercredi au samedi à 20h30, dimanche à 17h-

Compagnie Aberratio Mentalis

Texte Simon Grangeat

Mise en scène Claude Viala

Avec Hervé laudière, Carole Leblanc, Véronique Müller, Loredana Chaillot, Pascaline
Schwab Christian Roux, Julien Brault.

Assistant à la mise en scène Hervé Laudière

Musique Christian Roux

Scénographie Shanti Rughoobur

Durée 1h30

Vous vous souvenez sûrement de la complainte du progrès de Boris Vian qui énumère de façon surréaliste les nouvelles inventions qui occupent le cœur des ménagères : « La tourniquette à faire la vinaigrette, le ratatine-ordures et le coupe friture… A l’éventre-tomate, à l’écorche-poulet ! »

C’était en 1956, à l’époque du plein essor des biens de consommation. Qui se souvient par contre du nom de Jean MANTELET, cet obscur bricoleur de Bagnolet, un artisan autodidacte qui commença à travailler à 12 ans et fut à l’origine de tous ces articles ménagers censés « libérer le geste de la femme »

L’histoire a débuté en 1932, comme un conte de fées, lorsqu’en revenant de son atelier, Jean Mantelet exaspéré par la purée pleine de grumeaux que lui servait sa femme, eut l’idée lumineuse d’inventer le moulin-légumes à manivelle. Vous en trouverez encore, c’est sûr, à la brocante et peut être aurez-vous un serrement au cœur en pensant à cet objet de grand-mère, qu’aujourd’hui Moulinex c’est fini, qu’il ne reste plus que le nom de la marque car tous toux ceux qui ont contribué à sa célébrité ont disparu, ont été renvoyés aux oubliettes.

L’histoire de Moulinex a traversé des générations, des milliers d’ouvriers, d’ouvrières ont travaillé dans les usines situées notamment en basse Normandie.  En 1980, Moulinex était le numéro 1 de l’électro-ménager, employait plus de 10000 salariés et produisait 180000 articles par jour. Il y a 35 ans, non ce n’est pas une histoire de grand-mère.

D’où est venue la chute, da la crise du choc pétrolier, de la concurrence, du bouleversement du marché mondial ? Jean MANTELET qui travailla jusqu’à sa mort à près de 91 ans, semble-t-il, s’obstina à ne pas licencier ses employés pour faire face à la « dégringolade des marchés » mais ses successeurs, des financiers, sans aura paternaliste, sans états d’âme, opérèrent des licenciements massifs, se remplirent les poches avant d’abandonner Moulinex.

Vision simpliste de l’économie, probablement. Pourtant le scénario ne cesse de se répéter, et sans être économiste, il est clair que la chute d’une entreprise tient à son défaut d’équilibre. Dans la balance, il y a d’un côté ceux qui travaillent, les besogneux qui s’échinent dans des conditions parfois terribles, en 1932, les femmes s’amputaient les doigts dans les usines, et de l’autre côté, le pouvoir des financiers, des actionnaires qui pèse si lourd qu’il suffit d’une chiquenaude à la Bourse pour tout faire sauter.

L’histoire de Moulinex appartient à ceux qui ont travaillé pour rendre célèbre cette marque. Sans ce cœur à l’ouvrage, c’est certain, sans ce supplément d’âme, que sut insuffler le créateur du moulin-légumes, l’appareil Moulinex ne serait qu’un vulgaire accessoire. Or s’il n’est pas possible d’enterrer son nom, c’est qu’il porte l’empreinte des milliers des petites mains qui l’ont diffusé bon gré mal gré. L’histoire couvre tout de même trois quarts de siècle, de 1932 à 2001, plusieurs générations, une vision qui donnerait le vertige aux futures sur la crête du 3ème millénaire.

 Gardons-nous de toute nostalgie, l’histoire appartient à ceux qui l’ont vécue, à ceux qui voudraient la comprendre pour en tirer les leçons.

Cette belle page d’histoire qui commence comme un conte de fée et finit dans le bourbier, est racontée simplement par Simon GRANGEAT sans didactisme. Les comédiens polyvalents – ils chantent également et l’un d’eux joue du piano – donnent l’impression d’être complètement impliqués car ils interprètent tous les rôles, ceux des ouvrières, des contremaitres, des directeurs et financiers etc. Ressuscite la candeur des années cinquante à travers des slogans publicitaires bon enfant, Hervé Laudière, Jean Mantelet qui vieillit sous nos yeux, est étonnant.

A travers la mise en scène fluide et très animée de Claude VIALA, c’est un mouvement humain qui est exprimé qui pour certains pourrait paraître élémentaire, mais cela vibre tout de même aussi fort qu’un cœur Moulinex !

 Ces vibrations, le public les ressent. Qui ne se souvient de son moulin à café ou du bonheur simple d’avoir pu acquérir un robot Marie, une centrifugeuse… De la magie au quotidien, comment y résister, Boris Vian l’avait compris. Derrière les chiffres, derrière les objets que nous utilisons machinalement, il y a des femmes, des hommes, ne persistons pas à l’oublier.

Ne manquez pas ce spectacle qui remet les pendules à l’heure, l’aiguille du cœur peut bien frôler celle de l’économie. Exprimée avec chaleur, l’histoire de Moulinex est d’autant plus instructive et parlante, elle nous concerne tous !

Paris, le 12 Novembre 2017        Evelyne Trân

2 commentaires sur “UN COEUR MOULINEX de Simon Grangeat – Mise en scène de Claude Vialat – Au Théâtre de l’Opprimé – 78 Rue du Charolais 75012 PARIS – Du 08/11/2017 au 26/11/2017 à 20 H 30 – Du mercredi au samedi à 20h30, dimanche à 17h-

  1. Je vous recommande ce spectacle que j’ai vu hier !!!

    Une histoire qui fait voyager dans le temps et les émotions.

    Très beau texte, mis en scène pour la première fois.

    Venez les soutenir.

    À vos agendas !!!

    J’aime

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