Pris sur le fait, entre deux yeux, entre deux phrases, les instantanés judiciaires recueillis par le journaliste Dominique SIMONNOT, font penser à de vilaines photos qui jaillissent d’un photomaton, destinées à s’afficher sur un passeport et qui pour être conformes, rappelez-vous, ne doivent surtout pas être souriantes.
Chassez le naturel, il revient au galop. Il faut bien que le sourire se niche quelque part.
Le cocasse resurgit sous la plainte, on se croirait parfois en plein Feydeau, au milieu des poules, des coqs et des canards mais il s’agit pourtant d’hommes, de juges, de prévenus, d’avocats, enrôlés dans cette comédie de COMPARUTION IMMEDIATE à laquelle personne ne semble croire mais s’y résigne parce que l’air du temps c’est le temps, qu’il faut faire vite.
Et c’est tout de même dommage que les juges et les avocats n’aient pas le temps de s’apesantir sur les prévenus qui n’ont pour seul visage que l’énoncé de leur délits, de sorte que ce ne sont pas eux qui sont jugés mais leurs crimes tamponnés à la hâte de peines de prison.
Une espèce de mépris plane dans l’air qui rend cet air insupportable, voire révoltant. Suffit-il d’un délit pour perdre d’un seul coup la dignité, la respectabilité et devenir l’instant d’une comparution l’homme ou la femme du délit flasché et épinglé par un jugement sans appel.
Quelques textes poétiques émanant de témoignages de quelques délinquants rappellent leur humanité, celle là même qui ne peut pas se manifester dans ces procès expéditifs.
Bruno RICCI qui campe tous les rôles est un virtuose, il réussit à placer son empreinte d’humain à travers les reflets artificiels de colonnes de fer cinglantes. La scénographie de David BROGNON est justement glaçante. Les chimpanzés seraient-ils plus humains que nous?
La mise en scène décapante de Michel DIDYM fait résonner le marteau et l’enclume avec humour. Faut-il que nous riions alors que devrions pleurer ?
Paris, le 14 Octobre 2017 Evelyne Trân