RIMBAUD VERLAINE – ECLIPSE TOTALE DE CHRISTOPHER HAMPTON – ADAPTATION ET MISE EN SCÈNE DE DIDIER LONG – DU 13 JANVIER AU 6 MAI 2017 – Du mercredi au samedi à 21h – au THEATRE POCHE MONTPARNASSE 75 BD DU MONTPARNASSE 75006 PARIS –

Auteur : Christopher Hampton
Adaptation : Didier Long
Réalisateur/Metteur en Scène : Didier Long Interprètes : Julien Alluguette Jeanne Ruff  et  Didier Long

Rimbaud et Verlaine auraient-ils pu songer que leur relation intime soit exposée au même titre que leurs œuvres plusieurs décennies après leur mort.

Certainement pas, la postérité s’est emparée de leur histoire parce qu’elle était scandaleuse. Imaginez plutôt, un homme marié qui prend pour amant un adolescent encore mineur et pour comble de l’infamie manque de le tuer à coup de revolver.

De parfaits inconnus ont pu vivre de telles expériences. Les poètes n’ont pas le monopole de la passion. Mais lorsque leurs écrits portent la trace de leurs vies tumultueuses, la mémoire collective s’emballe. Rimbaud et Verlaine sont devenus des personnages mythiques, tels Tristan et Yseult, Héloïse et Abélard.

La pièce de Christopher HAMPTON adaptée et mise en scène de façon très dépouillée par Didier LONG, imagine la liaison charnelle et spirituelle qui a réuni les deux poètes durant deux ans de Septembre 1971 à Juillet 1973.

L’auteur s’est beaucoup documenté grâce aux correspondances de Verlaine et Rimbaud et leurs écrits réciproques. Mais la documentation ne peut suffire à faire jaillir les figures de ces poètes. Certes, il existe des photographies de chacun d’eux, l’un Verlaine parait-il était très laid, l’autre Rimbaud, très beau.

Dans la pièce, l’auteur fait dire à Rimbaud s’adressant à Verlaine « Ton esprit est aussi laid que ton corps ». Les rapports de force entre les deux amants sont impitoyables. Christopher HAMPTON fait le portrait de deux hommes aux personnalités complexes évidemment mais également profondément différentes. Rimbaud a toute l’arrogance de la jeunesse, il recherche la force mais prend appui sur un être talentueux mais d’un caractère velléitaire et faible au point de se laisser aller à battre sa femme.

A la lumière des éléments de biographie des deux poètes, nous pourrions être amenés à les juger. Mais de quel droit, nous ne faisons pas partie de leurs intimes, nous sommes juste lecteurs admirateurs de leurs poèmes. Si nous nous intéressons à la vie de Rimbaud et de Verlaine, c’est peut-être par une sorte de transfert amoureux, d’identification à leurs passions troubles car la chair est invoquée dans leurs poèmes, elle est véritablement explosive. Le dérèglement de tous les sens dont parle Rimbaud dans sa saison en enfer, sa rencontre avec Verlaine en fait partie.

En proie aux démons de l’alcool et d’une dépression latente Verlaine connaissait l’enfer. Rimbaud dans l’étincelance de sa jeunesse lui est-il apparu à la fois comme un ange rédempteur et un ange diabolique ? Nous savons que Verlaine s’est attaché à faire connaître les œuvres de Rimbaud, il l’aimait. Christopher HAMPTON suggère que Rimbaud adolescent était sensible à cet amour qui comblait un manque affectif et des angoisses terribles dont témoignent les quelques lettres d’appels au secours adressées à Verlaine. Même si ces œuvres sont mâtures, son comportement est vraiment celui d’un adolescent paumé.

Que Verlaine et Rimbaud ne soient pas mis en pâture par quelques biographes charognards, c’est ce que nous leur souhaitons. La biopsie de Christopher HAMPTON est honnête, elle a le mérite de créer l’illusion, celle d’approcher deux poètes phares de ce que nous sommes nous justes humains.

L’humanité transpire dans l’interprétation des comédiens. La composition intense de Didier LONG, Verlaine, est particulièrement impressionnante. Julien ALLUGUETTE quant à lui donne une vision de Rimbaud, spontanée et fraîche moins ténébreuse que celle que nous pourrions imaginer de l’auteur d’une saison en enfer. Jeanne RUF qui interprète Mathilde la femme de Verlaine, est la grâce même.

Homme ou poète ? Gageons que cette question Verlaine et Rimbaud l’ont essuyée tout le long de leur vie. Or, la chair exulte à travers le corps du poème, elle déplace des montagnes !

Paris, le 1er Mai 2017                               Evelyne Trân

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