FIN DE PARTIE DE SAMUEL BECKETT Du 12 Novembre 2015 au 13 Février 2016 Du jeudi au samedi à 19h30 au THEATRE DE L’ESSAION – 6 , rue Pierre au lard (à l’angle du 24 rue du Renard) 75004 Paris –

FIN DE PARTIE

Nous avons vu la pièce « Fin de partie » de Samuel BECKETT, il y a quelques mois, mais les visages des personnages continuent à nous poursuivre tant la présence des comédiens est  étonnante.

 Que raconte « Fin de partie » ? Pas grand-chose aurions-nous envie de répondre, mais tout de même, on y voit la fatalité trembler comme un tremblement de terre.

 En résumé, il s’agit d’un homme handicapé moteur et aveugle qui passe son temps à harceler son serviteur, voire même son esclave.

 L’homme attend la mort de toute évidence. L’infirmité dont il est victime – comme son père et l’épouse de ce dernier, devenus homme et femme troncs suite à un accident imbécile de vélo –  c’est la première étape vers la mort. Le seul homme valide  de la pièce annonce son infirmité future car il ne peut plus s’asseoir.

 Le sujet est sinistre mais  pas triste car évidemment, Samuel BECKETT n’entend pas s’apitoyer sur le sort de ces humains infirmes. Il pose une question qui nous concerne tous, y a-t-il  une porte de secours dans l’existence d’un homme autre que  la mort.

 Il semble que pour HAMM, la porte de secours soit celle de CLOV son esclave, mais aussi son imagination, car il aime raconter des histoires et il continue à rêver de la mer. La porte de secours de son père, c’est la tendresse qu’il éprouve pour son épouse mourante. On imagine peut être à tort que le dévouement que CLOV manifeste pour HAMM, constitue une sorte de raison de vivre, si ce n’est un moyen d’échapper au vide de son existence.

 La mort c’est une question de temps, nous dit BECKETT qui dans cette pièce explore théâtralement, à travers la conversation, cette vertu lumineuse du temps de s’échapper, de chevaucher à travers les pensées, de s’attacher à des petites phrases, des mouvements, des gestes banaux, des silences etc. D’une certaine façon, le temps est partout; nous vivants, nous sommes le temps.

 Cette sensation a quelque chose de merveilleux parce qu’elle exprime la vie et l’aléatoire de toute chose. Il suffit d’un balai pour passer le temps et toutes les banalités de la vie nous renforcent dans l’idée que quoique nous fassions, nous sommes, nous vivants, assujettis au temps. Et cette sensation, elle s’éprouve notamment lorsque contraints à l’immobilité lors d’un voyage en train ou en avion, le temps se rappelle à nous  dans cette insidieuse question « Que vais-je faire en attendant ? »

 Chacun répond à sa façon. HAMM rumine et imagine, CLOV lave le parquet, les deux vieux dorment et lorsque la vieille meurt, l’événement ne surprend personne.

 Le mince épisode du rat dans la cuisine qu’il faut rattraper,  symbolise encore ce temps qu’il faut tuer. Curieux rapport au temps et à la vie également que cette scène où l’on voit HAMM  appeler à sa rescousse un faux chien en peluche.

 Les personnages  sont si bien liés par le temps, leur vie, que l’absence ou la mort de l’un, invoquée, prend une dimension humaine collective, bon ou mal gré.

 Philippe CATOIRE interprète avec une belle truculence ce HAMM dictateur, pitoyable et émouvant. Jérôme KEEN exprime remarquablement un CLOV inquiétant, intérieur, qui s’oppose à l’extravagant HAMM. Marie HENRIAU, Nell et Gérard CHEYLUS, Nagg, comme deux vieux jumeaux, dans leurs tonneaux, sont spectaculaires.

 La mise en scène de Jean-Claude SACHOT est juste et saisissante. C’est que paradoxalement, une sorte d’hymne à la vie se dégage de cette fable métaphysique. On y sent des personnages qui se raccrochent désespérément à la vie, incompris d’eux-mêmes et des autres, mais toujours prêts à en découdre. Tout de même quand on y pense, elle pèse lourd la vanité humaine, sur ce fil fragile de la vie, elle est explosive dans cette mise en scène de la  Fin de Partie de BECKETT.

 Paris, le 2 Février 2015

mis à jour le 4 Novembre 2015             Evelyne Trân

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