Par Brice Berthoud, Dorothée Ruge, Dominique Hardy, Jessy Caillat ; Adaptation, construction, jeu : Brice Berthoud ; Mise en scène, construction marionnettes : Camille Trouvé ; Construction, manipulation : Dorothée Ruge ; Lumière : Gerdi Nehlig ; Bruitages : Xavier Drouault ; Squelette d’igloo : Cousin Doudou ; Transformation du noir au blanc : Eric Desvignes ; Musique : Guillaume Trouvé ; Coproduction : Théâtre 71 SN Malakoff, centre culturel Marcel Pagnol Bures s/ Yvette, Théâtre Jeune Public Strasbourg
Dans le cadre du Festival Mondial des Marionnettes de CHARLEVILLE- MEZIERES, la Compagnie Les Anges au Plafond présente à la Chambre d’Agriculture son spectacle Les Nuits Polaires .
Une occasion de dépaysement unique. En effet, l’équipe de la création s’est employée à recréer l’atmosphère d’une nuit polaire et c’est comme par enchantement que les spectateurs pourtant à mille lieues du Groenland sont conviés à pénétrer à l’intérieur d’un igloo et faire connaissance avec un curieux personnage solitaire, confiné dans un minuscule pied à terre avec pour seul compagnon Alexandre un coq assez déplumé.
Il n’y a pas beaucoup de place dans cet igloo en toile, les spectateurs resserrés en cercle peuvent bien faire l’objet d’une hallucination collective : ils sont partis au Groenland et sont vraiment rentrés dans un igloo. L’espace d’une heure, ils n’auront pour tout repère que le plafond de l’igloo, et un sentiment d’empathie envers cet homme seul (l’enfant que nous fûmes peut-être jadis, isolé dans un grenier, une cave, ou une cabane) Robinson Crusoé nordique, victime de la maladie du Vertigo.
Le bon sens terrien nous rappelle que trop de solitude ne sied guère à l’homme. Alors comment s’étonner que quelques âmes compatissantes ou pas aient l’idée de venir tenir compagnie au pauvre homme. Les créatures qui envahissent la cahute ne sont pas des anges . Ce sont des trappeurs, des aventuriers, des bourlingueurs, forts en gueule, buveurs invétérés, fomenteurs d’histoires extravagantes, mythomanes etc…
On oublie que ces créatures se présentent sous la forme de marionnettes tant elles sont expressives, vivantes, si proches de la bouche de leur manipulateur, et de celle du conteur Jorn RIAL dont elles semblent s’être littéralement échappées. Leur vitalité, leur pugnacité tient au fait qu’elles sont inspirées de personnages réels que l’écrivain et ethnologue danois Jorn RIEL a mis en scène dans une série de nouvelles « Les racontars arctiques ».
C’est le genre de spectacle accompli auquel il faut se rendre plusieurs fois pour en saisir toutes les nuances. Les lumières savent protéger le mystère des expressions, des gestes de ces marionnettes si humaines qu’elle rêvent aussi d’amour et du rayonnement d’une certaine Emma sur la banquise.
Ce qui réjouit aussi c’est que l’équipe de création se trouve dans la même longueur d’onde que celle qui parcourt un livre ouvert en pleine lune sur les genoux d’un lecteur, et les étoiles qui l’éclairent sont vraiment celles de l’imagination physique, ouverte, propice aux apparitions…
Le jeu de Brice BERTHOUD tient du vertige, la musique et les bruitages restent sur le mode de la discrétion comme pour mieux lever notre regard vers les incroyables marionnettes de Camille TROUVE .
Voila un spectacle de grande qualité que nous ne pouvons que recommander au public. L’art des marionnettistes loin de faire entorse à notre réalité, la prolonge vers ses cavités inouïes, lumineuses et palpables au cœur de notre humanité.
Paris, le 30 Mai 2015, mise à jour le 18 Septembre 2015 Evelyne Trân
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