Harangue de Guy Perrot à ses disciples
Post mortem in excelsis moi-même
C’est sur mon lit d’hôpital que je m’éveillai, faisant un rêve étrange : une grande Dame m’apparut. Non, ce n’était pas la fée Morgane non plus que la fée Carabosse : une grande Dame vêtue d’une robe peinte de côtes pour le haut, de tibia pour le bas. La robe, ce n’était pas du Jean-Paul Gauthier, non plus que du Paco Rabane.
Elle n’avait pas de peau sur les joues et, d’une joue à l’autre, un grand sourire s’épanouissait.
Elle ne manquait pas d’un certain charme assez bizarre.
Son charme n’avait pas la fluidité ni la grâce d’un Fragonard ou d’un Watteau, non plus que le sourire énigmatique de la Joconde.. Non, elle, c’était plutôt un top modèle vu par Bernard Buffet.
Je lui demandai son nom.
-Je suis madame AD PATRES et ce sont mes amis, la bonne fée SENILE, responsable de la sénilité ainsi que Monsieur ALTSHEIMER qui m’envoient prendre de vos nouvelles.
Je suis d’ailleurs accompagnée de Monsieur ROBLOT, un des designs des POMP. FU., qui est venu prendre les mesures pour votre petit lit futur, à une place et avec des anses pour le porter.
-Excusez, madame, mais pour me porter où ?
-Mais là où les ci-git rejoignent cyprès et où règne un grand silence.
En tant que poète, vous faisiez des vers de douze pieds. Vous aurez, maintenant des vers à vos pieds.
Vous taquiniez la muse : eux taquineront vos pieds.
Ce sera différent .
-Excusez-moi, madame, la faux que vous avez dans votre main droite, c’est pour quoi faire ?
-La faux, c’est symbolique. Tenez : fermez les yeux.
-Je les ferme et j’entends comme le bruit fendant l’air.
-Vous pouvez les ouvrir, me dit alors l’étrange Dame.
Je les rouvris et je vis un étrange paysage : des couleurs que je ne connaissait pas et qui s’étalait devant une étendue inconnue qui n’était ni un désert, ni un océan.
-Voilà où vous serez bientôt me dit la Dame.
-Oui, mais qu’est-ce ?
-Le néant ! ! !
-Le néant ? je serai bientôt chez les néambules, ce qui me changera, moi qui était somnambule.
Guy Perrot
Nous devons dire que notre latiniste, ayant beaucoup baguenaudé dans les méandres des fruits de la vigne, il est possible qu’il se trouve quelques fautes de syntaxe latine. (N.D.L.R.)
Et non pas pisse-vinaigre
Et lorsque je vois leurs trognes
Je me sens le cœur allègre
L’un d’eux qui boit plus que moi
Un jour qu’il tâtait l’oracle
M’a fait cet acte de foi
D’une voix de tabernacle
« S’il faut mourir mourons ivre
Et ainsi nous verrons deux morts
Et ainsi nous pourrons revivre
N’est-ce pas là un beau sort
« Ces gens qui pissent vinaigre
Ne se sentent qu’une issue
Et serrent leurs fesses maigres
Qui tremblotent et qui suent
« Eux pour qui tout est en un
Ils chopent la chair de poule
Quand vient la sombre catin
Ils ne voient pas qu’elle est double
« Ils ne meurent qu’une seule fois
Après une seule vie
Ils auraient eu la foi
Ils auraient double vie »
Aussi mes amis ivrognes
Buvons à brûler nos vie
Buvons à brûler nos trognes
Et rejoignons l’autre vie
Il y aura des ruisseaux
Des torrents de Beaujolais
Du Mâcon du Bordeaux
Du Brouilly de Verdelay
Il y aura nôtre ami
Et sa voix de tabernacle
Buvons fort craignons mi
Et profitons de l’oracle
Déjà le gosier me racle