
Photo Christophe Raynaud de Lage
Avec Fiona Chauvin & Guillaume Fafiotte
ASSISTANTS À LA MISE EN SCÈNE Jonathan Salmon, Valia Beauvieux
LUMIÈRES Sébastien Revel
CRÉATION SONORE Antoine Prost
SCÉNOGRAPHIE Colas Reydellet
COSTUMES Nadia Léon
A une époque où la surabondance des sollicitations virtuelles par écrans interposés, réduit à sa peau de chagrin l’imaginaire individuel, le spectacle LA MECANIQUE DU HASARD prouve qu’il est possible par le seul pouvoir du conte et la ferveur des conteurs de mobiliser l’imagination des spectateurs, petits et grands, de façon étourdissante.
Le récit adapté du roman américain de Louis SACHAR nous conte l’histoire d’un adolescent, Stanley Yelnats qui par malchance, accusé d’un vol qu’il n’a pas commis se retrouve dans un camp de redressement, Le lac vert, situé en plein désert.
De caractère timide, sans d’autres repères que le sentiment de la malchance prodigué par sa famille depuis trois générations, Stanley aura l’occasion d’interpréter ses propres épreuves de façon positive grâce aux rencontres, aux amitiés dont il tirera pleinement profit, qui lui permettront de rebondir et sortir du trou.
D’un point de vue symbolique, les trous que doivent creuser les adolescents à titre de punition insigne sous un soleil de plomb, font écho aux trous de mémoire de l’histoire de l’humanité, impossibles à combler, lieux maudits des superstitions et des interprétations les plus folles.
Cette punition absurde fait également écho au mythe de Sisyphe condamné à rouler un énorme rocher de haut en bas d’une montagne, éternellement.
Si la tâche en elle-même éreintant les corps n’a pas de sens, elle laisse néanmoins le champ libre au mental des adolescents acculés à réagir et à s’inventer d’autres projets beaucoup plus enrichissants. Ainsi Stanley en contrepartie de l’aide que lui apporte son ami surnommé Zéro, lui apprendra à écrire, déjouant la fatalité de son analphabétisme.
De nombreux thèmes jalonnent ce récit initiatique, le racisme, l’injustice, les rapports de domination. L’émotion qui s’en dégage est celle ressentie par des jeunes sans à priori qui ne peuvent qu’être stupéfaits, intrigués par la violence des événements qui leur sont rapportés. Par exemple, comment et pourquoi, la maison d’une institutrice a-t-elle put être incendiée pour le seul crime d’avoir embrassé un homme noir ?
Le sentiment de la fatalité qui concentre toutes les peurs peut faire place à l’apprentissage et la découverte de soi car c’est un message adressé aux jeunes, celui de croire en eux-mêmes, d’écouter leurs cœurs ; la quête des origines, le respect de l’arbre familial tutélaire ne pouvant en aucun cas se substituer à leur propre essor, au désir de s’affranchir des moules du passé pour poursuivre leur aventure, vivre leur vie.
L’effervescence du récit truffé d’humour s’est emparée des comédiens conteurs qui évoluent sur une scène à peu près nue. Seul un vieux réfrigérateur y trône comme emblème farceur, à savoir, d’une mémoire tutélaire frigorifiée qui va être investie par de jeunes pousses.
LA MECANIQUE DU HASARD bat son plein, avec ces multiples ressorts parfaitement investis par les interprètes très vifs qui font de ce récit exaltant, une vraie ruche d’abeilles stimulant et piquant de façon jubilatoire notre imaginaire.
Paris, le 8 Novembre 2018
Mis à jour le 14 Juin 2019
Evelyne Trân
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