- Interprète(s) : DANIEL MESGUICH, STERREN GUIRRIEC, ALEXIS CONSOLATO
- Chorégraphie : Caroline Marcadet
- Lumières : Gaylord Janvier
- Décors : Camille Ansquer
- Diffusion : Pierre-Jean Robin
Crèverons nous jamais l’abcès de nos délires ? Y a t-il un bout du monde ? Comment ces infatigables rêveurs, ceux qu’on désigne poètes, généralement, qui arpentent de long en large des rues toujours versatiles sous leurs regards, peuvent-ils s’accommoder de la bêtise, la vulgarité qui s’échappent trop souvent du trou du cul du monde, cet antique ustensile, la télévision ?
Olivier ROLIN a imaginé la rencontre entre un voyageur du bout du monde avec une jeune femme, isolée, serveuse dans un bar qui n’a de qualité de bar que le décor, mais il s’agit tout de même d’un lieu public comme la rue.
Le voyageur énigmatique dont le rôle sied comme un gant à Daniel MESGUICH, est une douce incarnation d’un Socrate poète qui déroule tant et si bien sa maïeutique qu’il permet à la jeune femme – interprétée par Sterenn GUIRRIEC, très émouvante -, les pieds sur terre, d’exprimer son paysage intérieur, lequel n’a rien à voir avec son environnement grossier incarné par la télévision . Cette dernière en somme n’existe que pour combler le vide qui l’entoure.
Elle est tout de même réjouissante cette télé interprétée avec une drôlerie jubilatoire par Alexis CONSOLATO, elle fait penser à un animal domestique, un perroquet qui se pavane croyant que ses paroles sonnantes et trébuchantes ont valeur d’or télévisuel.
L’auteur semble n’avoir qu’une idée en tête, laisser divaguer ses personnages dont l’union créera la force, celle de l’imagination contre le pouvoir occulte et intrusif du ridicule et archaïque perroquet.
Il s’agit vraisemblablement d’une fable, d’une rêverie. Bien sûr nous avons du mal à imaginer le créateur du sourire de la Joconde laisser tomber sur son chevalet les déjections d’un perroquet fût-il télévisuel.
La voyageur et la serveuse empruntent le chemin d’un ailleurs qui n’a plus tout à fait la côte. En vérité, si la télévision pense pour nous, qu’avons nous besoin de nous pencher dans notre abîme intérieur pour y découvrir quoi, des couleuvres, des tristesses, quelques beautés certes mais pour quoi faire !
Le voyageur et la serveuse du bout de leurs branches respectives, découvrent qu’ils touchent le même ciel et que c’est un même rêve qui les aimante, un profond désir de liberté.
Quand la solitude devient forêt celle où tous les arbres se dévisagent, ont quelque chose à se dire, l’œil fouineur du voyageur devient metteur en scène pour jeter le trouble, seulement dire aux spectateurs « Je vous offre un rêve ».
Ce rêve qui glisse entre les paupières nous touche comme deux petites feuilles balancées par le vent, qui l’espace d’un instant, suspendues au soleil, nous font signe.
Paris, le 14 Juillet 2017 Évelyne Trân