
Introduction
Godot viendra-t-il?
Description
Pour clore en beauté son cycle Beckett, Jacques Osinski retrouve Denis Lavant rejoint par Jacques Bonnaffé, Aurélien Recoing et Jean-François Lapalus pour la plus célèbre pièce de l’auteur : En attendant Godot. Sur scène, un arbre sans feuilles. À ses pieds, un homme : Estragon. Entre un autre homme : Vladimir. Ils attendent Godot… Ils ne le connaissent pas mais l’attendent comme un sauveur. Aucun ne sait au juste de quoi ce mystérieux personnage doit les sauver, si ce n’est peut-être, justement, de l’horrible attente.
équipe artistique
Jacques Osinski – Mise en scène
Jacques Bonnaffé – Interprétation
Jean-François Lapalus – Interprétation
Denis Lavant – Interprétation
Aurélien Recoing – Interprétation
Yann Chapotel – Scénographie
Sylvette Dequest – Costumes
Evelyne Jacquier – Diffusion
Adèle Maugendre – Administration
Catherine Verheyde – Création lumière

Attendre ou ne pas attendre, that is the question une des plus existentielles qui soit. Parce qu’elle implique une certaine conscience de l’espace temps qui nous est octroyé sur l’instant .C’est la raison pour laquelle interroger cet espace temps va de soi au théâtre puisque c’est le lieu où se produit une représentation unique pour le public, unique car la représentation suivante ne pourra pas être tout à fait la même et que le public aussi aura changé.
L’attente est une expérience commune à tous les humains et même aux animaux. Il vaut voir attendre une chatte après sa gamelle, c’est impressionnant !
Et comment occuper le temps de l’attente ? Apparemment les deux premiers personnages d’En attendant Godot, qui occupent la scène ont du temps à revendre. C’est pourquoi sans doute, ils discutent de tout et de rien laissant même filer la conversation. Il n’est même pas sûr qu’Estragon qui fait penser à un S.D.F, tout occupé qu’il est à enlever une chaussure, écoute vraiment Vladimir.
Les deux hommes font penser à des gosses égarés dans une cour de récréation vide. Le seul arbre qui aurait pu enchanter l’atmosphère est peut-être mort. A l’acte suivant il aura juste quelques feuilles…
Dans l’environnement le plus misérable, il y a toujours quelque chose qui parle de la vie. Dans cette pièce, étonnamment ce sont les godasses d’Estragon qui sont impressionnantes. Souvenons nous des souliers de Van Gogh et plus proches de nous, de vieilles chaussures destinées à la poubelle. Des godasses qui ne sont pas un détail et nous en disent long sur les galères d’Estragon.
Estragon et Vladimir, deux personnages en quête d’auteur, aurait-on envie de dire. Beckett ne se prenait pas pour Dieu et il restait silencieux face aux questions qu’a alimentées ce Godot invisible.
Elle revient comme une triste litanie cette phrase : Attendre Godot. Du coup les deux compères ne bougent pas, ne font rien. Ils attendent et leur attente fait un peu penser à celle du soldat dans le Désert des Tartares de Buzzati.
Car l’attente a quelque chose à voir avec le désir, la pulsion de vie. Estragon et Vladimir attendent ensemble et cette circonstance les lient profondément. Ils se soutiennent mutuellement et c’est cette fraternité qui ensoleille la pièce.
Avec la mise en scène de Jacques OSINSKI fidèle au minimalisme de BECKETT, il suffit de faire appel à son vécu pour avoir un sentiment de déjà vu, de déjà entendu, (à moins que cela ne soit l’effet d’avoir vu déjà plusieurs fois cette pièce) . Ces gens pourraient faire penser à des personnes attendant sur un banc public . Et nous le public nous serions aux premières loges à les regarder du haut d’une fenêtre, incognito.
Car c’est un spectacle que celui de la rue, car c’est un curieux sentiment que celui d’être voyeur. On pourrait dire que c’est à la fois malsain et excitant de se retrouver dans la position de voyeur. N’assisterions nous pas un rêve éveillé de Beckett ? Oui ces personnages Estragon et Vladimir il les a rêvés et puis comme il le dit, pour rompre la monotonie il a créé un autre couple antinomique celui de Pozzo et Lucky, le maitre et l’esclave.
Dans cette mise en scène la rupture d’atmosphère est cinglante. Autant les relations entre Estragon et Vladimir paraissent affectives, autant celles de Pozzo et Lucky sont sous le signe du conflit exacerbé.
Et puis il y a cette roue qui tourne, le jour qui fait place à la nuit. Alors on se demande si Estragon et Vladimir ne courent pas après le temps comme à la chasse aux papillons. Car c’est pendant l’attente, que l’instant peut se déclarer puis disparaitre.
Oui, pendant la représentation on sent le temps s’écouler. Le public participe à l’attente des protagonistes. Etrange comme impression. Vladimir placide, Estragon, sale gosse . On croirait des gosses qui jouent à être adultes.
Et dire que tous ces personnages, ils nous guettent peut-être dans la rue. Nous saluons la grande justesse de tous les comédiens et la mise en scène de Jacques OSINSKI qui oscille entre statisme et ressort, le point de bascule, l’absence de Godot.
Evelyne Trân
Le 26 Juillet 2025
Tournée :
• Le 27 juillet, dans le cadre du Festival de Théâtre de Figeac (46)
• Le 29 juillet, dans le cadre du Festival Beckett, à Roussillon (84)
• Du 25 mars au 3 mai 2026, au Théâtre de l’Atelier (75)