relâche les 10, 17, 24 juillet
10h00 1h

© Photo : Laurencine Lot
Textes de : Jehan-Rictus (issus du recueil « Le cœur populaire »)
Mise en scène : Guy-Pierre Couleau
Avec le soutien de l’ADAMI dans le cadre du dispositif déclencheur théâtre.
Ces histoires issues du recueil « Le Cœur populaire » sont un manifeste en faveur du Pauvre, ce bon vieux Pauvre dont tout le monde parle et qui se tait toujours ; ce Pas-de-Chance que tout le monde voit mais que personne ne regarde. Jehan-Rictus décrit des personnages du peuple avec une vérité qui bouleverse et surprend. Seule en scène, Agathe Quelquejay offre à notre écoute une langue populaire haute en couleur, fascinante invitation à revisiter le français d’aujourd’hui.
Faire résonner la voix des pauvres pour qu’enfin on l’entende ! Est-ce donc possible du beau langage avec la langue des pauvres, des miséreux, celle de l’argot. Oh oui et c’est Jehan-Rictus, celui qu’on surnomme le Rossignol à la langue pourrie qui va l’honorer cette langue. Il la connait si bien qu’elle enchante son inspiration.
Mais qui connait Jehan-Rictus (1867-1934) ? Certes il a droit à une page sur Wikipédia mais figure-il dans les manuels scolaires ? Jehan-Rictus « enfant de l’amour », non reconnu par son père, exerça mille métiers, il fut S.D.F et connut la misère avant le succès avec le Soliloque du Pauvre.
C’est lui rendre grâce que d’interpréter au théâtre quelques unes de ses poésies tirées du recueil Le Cœur Populaire . Dans une mise en scène très épurée de Guy-Pierre COULEAU, Agathe QUELQUEJAY s’y consacre avec bonheur. De toute évidence, elle la vit complètement cette poésie . Ce sont des mots qui sortent de la bouche d’enfants maltraités, que l’on entend gémir, soupirer, haleter, souffrir, des gueulantes de miséreux mais qui parlent aussi d’amour. Cette langue des pauvres, Agathe Quelquejay peut la mimer, la danser aussi. C’est une langue vivace qui vous regarde en face et qui a ses beautés. Elle frotte les murs, les trottoirs, la poussière, en un mot, elle est physique.
Jehan-Rictus devait être un fieffé slameur lui qui joua et chanta les chansons du Soliloque du pauvre dans des cabarets de la Butte Montmartre dont le Chat Noir. Il emploie la forme octosyllabique qui « rend admirablement l’expression dolente musicale » de la langue parlée par l’ouvrier des faubourgs parisiens et qui s’oppose au vers alexandrin « qui est un cercueil dans lequel on couche la poésie française ».
Comment résister à vous livrer un extrait de Berceuse pour un Pas-de-chance :
Le turbin a pris ma jeunesse,
Ma santé, ma joie, mes désirs ;
Et vioque on m’a laissé moisir,
Seul et nu devant la Richesse.
Et quand à ces gas économes
J’ai d’mandé un d’pain ou d’pèze ;
Y m’ont cité les « droits de l’homme
Et m’ont chanté « La Marseillaise’.
Agathe Quelquejay nous parle de « remettre en lumière les merveilles de notre langue ». Les poésies de Jehan-Rictus en font partie, elles sont à découvrir ou redécouvrir sans modération avec ce spectacle au Festival off d’Avignon
Evelyne Trân
Article mis à jour le 29 Juin 2025