Les Pieds sur Terre de Gilles Granouillet au Théâtre de Belleville -16 passage Piver – 75011 Paris du 2 au 30 avril 2025 Mer. 21h15, Jeu. 21h,Ven. 21h15, Sam. 21h15. 

Texte Gilles Granouillet

Mise en scène Michel Burstin, Bruno Rochette, Sylvie Rolland 

Avec Philippe Awat, Bruno Rochette, Sylvie Rolland, Erine Serrano

Scénographie Thierry Grand
Lumières Vincent Tudoce

Son et musique Pascale Salquin 

Costumes Alexandra Langlois

Peut-on défier la loi par solidarité ? 

Les Pieds sur Terre met en scène une bande de Pieds nickelés, qui en voulant boucher un trou pour la bonne cause, en creusent un autre, plus profond : M. Moreau et sa fille Suzanne arrivent sur scène et s’adressent directement au public. Ils sont venus eux-mêmes raconter une tranche de leur vie passée qui les a transformés et a changé leur relation. 

À l’époque, Moreau, ex-cadre sup devenu vigile, surprend un vol de parfum par une caissière. Dilemme : la caissière est l’ancienne nounou de Suzanne. Moreau risque sa place s’il la couvre. S’il ne le fait pas, c’est elle qui perdra son poste. Voilà l’élément déclencheur de ce polar social, légèrement mystique et joyeusement immoral, qui interroge les liens humains, sociaux, intimes et intergénérationnels.

Un polar social qui mettrait en ébullition nos révoltes souterraines, enfin celles qu’il vaut mieux taire en public pour rester tranquille ?

Le théâtre permet de monter sur ses grands chevaux, incognito. A qui oserait vous accuser de prôner le vol et l’immoralité dans vos écrits, vous répondrez que votre terrain de prédilection c’est la littérature et l’imagination et que l’humanité a intérêt à ne pas freiner cette dernière faute de quoi la littérature dont le théâtre est une forteresse ne fonctionnerait plus qu’avec des béquilles sous les auspices de l’intelligence artificielle.

Dans sa nouvelle pièce, judicieusement intitulée Les Pieds sur Terre, Gilles GRANOUILLET fait feu de tous bois pour ériger en comédie, un fait divers si banal qu’il donne des sueurs froides.  Un dénominateur commun aux personnages, la honte, l’humiliation, conséquences des rapports de force fort bien huilés dans notre société entre des salariés et des managers, des commissaires et des prévenus etc.  

En vérité Gilles GRANOUILLET ne s’emballe pas. Le personnage du vigile, ancien cadre, est très humble, il ne s’aviserait pas de sauter à la figure de son patron, ce serait comique mais pas réaliste. Tout de même, c’est un sale boulot que celui de vigile, voilà ce vigile contraint, pour ne pas perdre son boulot, de dénoncer l’ancienne nounou de sa fille qui a eu la mauvaise idée de fourrer dans son sac un mauvais parfum (la malheureuse aurait dû le choisir haut de gamme mais il faut être pauvre jusqu’au bout).

La voleuse, une certaine Madame DOS SANTOS invisible sur scène risque sa peau c’est-à-dire sa place de caissière et vu qu’elle est quinquagénaire, de ne plus trouver de travail.

Houspillé par sa fille, une arrogante adolescente, droit dans ses bottes, le vigile fait un malaise puis est victime d’une hallucination, l’apparition d’un mage impertinent muni d’une grosse valise (c’est le fardeau que chacun doit porter dans sa vie).

Nous n’en dirons pas plus car la pièce est à découvrir et la conclusion du suspense qui met en ébullition nos papilles sociales, est assez inattendue.

 Les comédiens.nes font preuve d’un superbe abattage pour faire de ce drame social une comédie qui finit bien.

On pourrait penser à une fable de La Fontaine du style, Le Corbeau et le Renard, « Cette leçon vaut bien un fromage sans doute… ». Bien-pensante, elle ne manque pas de sel !

Evelyne Trân

Le 11 Avril 2024

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