MARCUS ET LES SIENS de Charif GHATTAS au Théâtre de la Reine Blanche 2 Bis Passage Ruelle 75018 PARIS du 7 février au 10 mars 2024.

Histoire d’amitié, de famille, de tribu

Le synopsis du spectacle :

À la demande de Marcus, metteur en scène et directeur de théâtre, une troupe de comédiens se réunit pour la première fois depuis la perte de leur amie la plus chère. Cette tragédie a fait voler en éclats leur famille artistique. La révélation imminente de Marcus pourrait définitivement rompre leur amitié. Confrontés à une situation qui nous dépasse, comment faire face au surgissement de la violence qui ébranle nos certitudes?

L

DistributionMÉLISSA BROUTIN, AUGUSTIN DE MONTS, CHARIF GHATTAS, QUENTIN PAULHIAC, AURÉLIEN RONDEAU, ANNE WERNER.

Mise en scèneCharif GHATTAS

Elle est terrible la pièce de Charif GUATTAS, Marcus et les siens. Ce titre qui laisse imaginer une histoire d’amitié n’annonce pas l’évènement tragique qui va la bouleverser . Marcus c’est le chef de troupe, un directeur de théâtre qui convoque ses membres après 2 ans de silence. On devine qu’il a été cruellement touché par l’assassinat de sa compagne Mathilde, une cinéaste engagée par un terroriste. Une grande partie de la pièce qui dure 1 H 45 permet de faire connaissance avec les comédiens.nes qui ont été également frappés par la mort de Mathilde, leur amie. Les caractères de chacun.ne sont suffisamment prononcés pour animer des discussions entre eux parfois violemment jusqu’à en venir aux mains. Cependant leur questionnement concerne surtout Marcus dont ils ne saisissent par les intentions. C’est alors que Marcus qui apparait très perturbé leur apprend qu’il a séquestré le terroriste qui se trouve dans les lieux mêmes du théâtre…

 L’auteur instaure un suspense tout le long de pièce avant le dénouement brutal. Il a choisi des artistes de sa propre compagnie, excellents interprètes, pour endosser les personnages dont les réactions sont finement exposées de façon à les rendre attachants et à mesurer la force de leur amitié en dépit de leurs différences. A contrario, le terroriste qu’on ne verra pas est fantasmé au point de n’être que la bête à abattre. Ce terroriste n’est certainement plus un humain, il a commis un acte abominable qui l’exclut du genre humain.

Ce sentiment semble partagé par l’ensemble de la troupe mais l’auteur  n’entend pas porter de jugement moral. Il s’agit plutôt d’essayer de comprendre comment la violence, la haine, l’esprit de vengeance font irruption chez des individus au point de les pousser au meurtre.

Il suffit de voir l’une des protagonistes de la pièce resurgir du fond da la salle de théâtre les mains et le visage barbouillés de sang pour éprouver l’horreur du crime.

Nous ne sommes pas chez Macbeth de Shakespeare car il ne s’agit pas d’un acte isolé mais d’un acte qui s’assume collectivement. Le terroriste en question est devenu une prise de guerre.

La pièce interpelle et suscite des réflexions au cœur de l’actualité.

Jusqu’où peut-on aller au nom du collectif ? Faut-il parler de « bête » d’instinct primaire chez l’humain qui le pousserait à la guerre, au crime ? Le fait est qu’il y a une culture de la guerre et de la haine depuis l’antiquité et au-delà. Ne parle-t-on pas de héros de guerre ? Si c’est la bête qui s’exprime, faut-il qu’elle devienne l’alibi de crimes annoncés parce qu’ils ont été de tout temps valorisés ?

La question est ouverte bien entendu. Œil pour œil, dent pour dent, quand donc la loi du talion passera-t-elle à la trappe ?   

Le 8 mars 2024

Evelyne Trân

N.B : Le texte de la pièce est publié à l’Avant-scène Théâtre du 15 Mars 2022 N°1520

L’article a également été publié dans le LE MONDE LIBERTAIRE.FR

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