L’AQUOIBONISTE librement inspiré de « La mort d’Olivier Bécaille de Zola » . Texte et mise en scène de Jean-Benoît Patricot avec Bertrand Skol à La Scène libre 4 Bd de Strasbourg 75010 PARIS du 1er février au 24 mars, les jeudis, vendredis, samedis 21 H.

Texte, mise en scène et décors : Jean-Benoît Patricot.
Texte publié aux Éditions Les Cygnes.
Lumières : Johanna Legrand.
Musique originale : Olivier Mellano.
Voix off : Salomé Villiers, Tessa Volkine, Olivier Pajot.
Avec Bertrand Skol.

Serti d’une mise en scène très impressionnante – nous avons encore dans nos pupilles la vision d’un lit debout où s’expose un homme, mais il ne s’agit pas d’un homme sandwich mais d’un homme seul – le spectacle de Jean-Benoît PATRICOT inspiré d’une nouvelle de ZOLA, est un thriller psychologique, une sorte de film éveillé qui avance et qui recule au gré des pulsions d’un rêveur.

La nouvelle de Zola nous conte l’histoire effarante d’Olivier BECAILLE atteint de catalepsie qui se retrouve enterré vivant.  De l’horreur de cette situation, Patricot tire un cauchemar dont l’issue est tout à fait inattendue.

La réalité concrète, le fait divers à sensations, celui d’être enterré vivant,  offre à Zola puis à Patricot l’opportunité d’explorer à fond le ressenti de l’enfermement, l’isolement, l’impossibilité de communication avec autrui, chez un individu ordinaire.

Chez Zola, le protagoniste porte le fardeau d’un travail sans intérêt ;  il est déjà un enterré vivant et n’a pour seul bonheur que sa jeune épouse.

Chez Patricot, le héros est également cloué dans son lit puis à la morgue mais son esprit vagabonde comme s’il était secoué d’une urgence, celle de se raccrocher coûte que coûte à la vie, alors même qu il faisait figure d’aquoiboniste à cause de sa manie de répondre «  A quoi bon » à ses collègues de bureau.

Paradoxalement, c’est cette confrontation à la mort qui semble stimuler la force vitale du héros.  Bécaille devient un personnage auquel il est possible de s’identifier dans la mesure où tout un chacun peut se retrouver dans des situations où il est démuni, soit parce qu’il est retranché en lui même mentalement soit que pour une raison ou une autre, il est coupé du monde, un ressenti extrême qui favorise le délire.

Dans son délire, Bécaille retrouve le visage de sa femme aimée qui représente la lumière au bout du tunnel,  il n’est donc plus seul.

L’histoire d’amour transcende cette omniprésence de la mort  et étonnamment ce n’est pas l’angoisse qui semble dominer ce personnage mais plutôt une volonté de vivre exaltée comme si le fait d’avoir été menacé de perdre la vie avait décuplé son énergie.

Quid de la réalité ? Il est déjà surprenant qu’un auteur comme Zola qualifié de réaliste ait pu se mettre dans la peau d’Olivier Bécaille. Quant à Jean-Benoit Patricot, il donne libre cours aux fantasmes du personnage qui rejoint alors les héros les plus fous de certaines nouvelles fantastiques et romantiques d’Edgar Poe ou Maupassant .

L’imagination du héros dame le pion à l’aspect sordide de son enterrement, elle s’enflamme et court-circuite celle du public qui assiste stupéfait à la lutte hallucinante d’un homme déclaré mort . L’intense interprétation de Bertrand SKOL plus lumineuse que pathétique  plonge le public dans une ambiance onirique où tous les sens se retrouvent, l‘ouïe grâce à la musique d’Olivier MELLANO, l’œil et la chair. Quand l’amour finit par tenir tête à la mort !

Le 13 Février 2024

Evelyne Trân

Article également publié sur le MONDE LIBERTAIRE.FR

N.B : Jean-Benoît PATRICOT et Bertrand SKOL étaient les invités de l’émission Deux de scène de Scène de Radio Libertaire 89.4,  le samedi 24 Février 2024.

Ci-dessous l’interview :

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